Cadillac à Detroit, Buick à Williams

C’est la Fête Nationale des États-Unis, bonne fête à tous mes amis américains !

Quilt patriotique de Judy Martin
Magnifique, encore en l’état de top, fait par Isa la Quilteuse.
Les Patriotic quilts conviennent bien au style quilts Country, voici un très joli de Cheri Payne.
Ravissante mise en scène d’un mini-quilt patriotique fait par Muriel Gendreau, qui écrit l’élégant blog Verveine & Lin. Ce quilt est inspiré d’un modèle de la même Cheri Payne. Modèle gratuit ici.
Le 14 juin dernier, Flag Day (Jour du Drapeau), Marie-Claude Picon a publié plusieurs photos de ses quilts patriotiques sur FB : tous splendides !
Mon seul quilt patriotique ! Il est petit, il mesure environ 50 cm de côté.
Son étiquette au dos me rappelle que je l’ai fait lors des précédentes élections présidentielles américaines…

Pour ce 4 juillet, célébré comme toujours dans tout le pays en rouge-blanc-bleu (et avec un masque SVP), faisons un tour en voiture. Mais prenons le chemin de l’Histoire, pas à pas…

L’Amérique a été conquise par des aventuriers, et si le temps est à la remise en cause des héros et des décisions du passé, il n’en reste pas moins qu’on peut admirer l’épopée de beaucoup de ceux qui ont fait l’Histoire.

Imaginez un jeune homme, né en 1658 en terre gasconne, comme les Mousquetaires et notre nouveau Premier Ministre (mais la comparaison s’arrête là), plus précisément à Saint-Nicolas-de-la-Grave au nord de Toulouse et à l’ouest de Montauban. Il est né dans une famille bourgeoise, son père étant avocat au Parlement de Toulouse et sa mère de famille commerçante aisée. On ne sait trop ce qu’il a fait ou subi, mais Antoine Laumet sent qu’il doit se faire oublier et prend le large à 25 ans. Le large, le grand large ! Il arriva d’abord à Port-Royal en Acadie, terre alors française (Canada), explora les terres de la côte Est et de l’Acadie française en se familiarisant avec les autochtones, leurs langues et coutumes. Comme nombre de Français, il fit le commerce de fourrures en échange d’alcools, achetant aux Indiens et vendant aux Anglais (et inversement). Le Gascon s’est inventé une nouvelle identité en s’anoblissant au passage et devient Antoine de Lamothe, Sieur de Cadillac. Simplement parce ça sonnait bien comme ça… et avec les réminiscences du nom d’un ami de son père du Parlement de Toulouse !

Timbre de la Poste américaine, édité en 1951, célébrant les 250 ans de l’établissement de Lamothe-Cadillac à Detroit en 1701.

Je vous la ferai courte, sa vie est riche en expériences et en esprit d’entreprise, mais aussi en (més)aventures. Le Sieur avait fort mauvais caractère et aussi l’envie de s’enrichir, mais pas toujours de manière légale ! L’Histoire retient surtout de lui que, visionnaire, il fonda, en un lieu stratégique, une colonie française sur un détroit (en réalité, une rivière, entre les lacs Huron et Érié) : Fort Pontchartrain du Détroit, en 1701. L’appellation s’allégera du nom du Ministre de la Marine de Louis XIV, Pontchartrin, et de son accent français sur le e pour devenir simplement Detroit. Cette rivière est actuellement sur la frontière entre le Canada et les USA.

Statue de Cadillac à Detroit ; subit-elle en ce moment l’outrage du déboulonnage ou du peinturlurage ?

Héros sublime pour certains, fieffé coquin pour d’autres, Cadillac mena une vie constamment agitée et aventureuse, militaire, corsaire, colonisateur avec des honneurs, des titres, des fortunes, il devint même Gouverneur de Louisiane (qui s’étendait alors des Grands Lacs au Golfe du Mexique !), mais aussi des poursuites et même un emprisonnement à la Bastille… Cadillac décida de finir Gouverneur de Castelsarrasin, près de sa ville natale, et y mourut à l’âge de 72 ans. Un sacré personnage à la vie bien remplie !

L’histoire ne s’arrête pas là. Detroit était effectivement un point stratégique, la ville française se développa puis fut cédée aux Etats-Unis en 1783, à cette nouvelle nation indépendante depuis le 4 juillet 1776. Detroit continua son développement au 19e siècle en fabriquant les carrioles pour se déplacer en ville et à la campagne mais aussi les chariots en bois destinés à rouler vers le Far West, les voies navigables favorisant le transport lacustre du bois.

 

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Transport en traîneau dans Detroit, les hivers y sont rigoureux ! Années 1900 – Archives de Detroit News

Au tournant du 20e siècle,
la richesse de Detroit en fit « le Paris du Midwest »,
avec de somptueux immeubles Beaux-Arts et baroques,
de larges avenues et espaces verts publics.

Vers 1910, voitures à chevaux et voitures à moteur se partagent le travail de déplacement des personnes, ainsi que le tramway mû à l’électicité.
Detroit, Woodward Avenue, avant 1920

La ville de Detroit célébra en grande pompe les deux cents ans de sa création en 1901. Au même moment, au même endroit, Leland, Murphy et Bowen, constructeurs de « chariots à moteur », des automobiles, baptisèrent leur premier joyau en hommage au fondateur dont le nom était sur toutes les lèvres : en 1902, la mythique Cadillac est née ! Dès lors, les progrès et inventions se succèdent chez les multiples constructeurs d’automobiles américains, concentrés à Detroit.

La première Cadillac n’était pas une voiture de luxe, mais un prototype avec beaucoup d’innovations techniques. Photo de 1903 – Smithsonian Institution.
Le 1er logo des voitures Cadillac, c’est simplement le blason du Sieur de Cadillac.

Detroit continuera, au long du 20e siècle, d’être la Motor town, LA ville des constructions automobiles. Les chevaux de chair et de sang sont remplacés par ceux sous le capot.

Voiture de luxe extravagante des années 1950-60, la Cadillac Eldorado. Après avoir maîtrisé la crise des années 1930, Cadillac se positionne à la tête des voitures de prestige pendant plusieurs décennies.
Son logo a souvent changé, à présent il est stylisé à la Mondrian mais garde le souvenir du Frenchy !

Les grandes voitures américaines ont le chic pour avoir des noms qui parlent, j’avais déjà évoqué les Ford Mustang par ici.

Et la Pontiac, autre gamme de voitures très chic ? Elle honore Obwandiyag (prononciation : bwon-diac, d’où Pontiac), un grand chef Amérindien du 18e siècle de cette région de Detroit qui, comme bien souvent, s’entendait très bien avec les Français mais pas du tout avec les Anglais !

Pontiac, 1720-1769, homme politique, chef de guerre
Une Pontiac. Le logo représente une flèche stylisée, en l’honneur du chef indien.

Toutes les voitures mythiques américaines qui peuplent notre imaginaire, les Cadillac, les Pontiac, les Buick, les Chevrolet, les Mustang, les Chrysler furent construites à Detroit. Éternel rival de Ford, General Motors fut fondé par un certain Durant, d’ascendance française lui aussi. Il lança même la marque Frigidaire en 1918 pour des compresseurs pour la climatisation de voitures… puis on sait ce que cela devint !

Detroit connut un essor fantastique, la construction automobile faisant appel à une nombreuse main d’oeuvre, la population consommant et boostant l’économie ! Elle fut la 4e ville américaine avec près de 2 millions d’habitants (1955-60). Mais les automobiles américaines perdirent leur monopole pour diverses raisons et peu à peu, avec la gestion exécrable de la ville et la catastrophe des subprimes, celle-ci a sombré, jusqu’à sa mise en faillite en 2013. Ses habitants, plus que 700 000, vivent majoritairement dans une grande pauvreté (les revenus les plus bas par habitant des USA, alors qu’en 1960 Detroit détenait la 1ère place) et l’insécurité. Detroit renaîtra-t-elle de ses cendres ?

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C’est l’usine de carrosserie historique de General Motors, laissée à l’abandon comme des milliers de bâtiments et maisons à Detroit.

Detroit n’est pas sur la Route 66, mais je souhaitais faire un clin d’œil à ce Sieur de Cadillac pour qu’on se souvienne que les pionniers ont beaucoup travaillé et innové, ils ont été imparfaits sans doute, mais aussi vaillants et novateurs ; les massacres ou mauvaises orientations sont bien souvent dus aux ordres et décisions des gouvernements européens puis des USA…

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Pour finir, je vous dévoile ma voiture
pour mon grand voyage de septembre 2020 :

Cette Buick vintage brille de mille feux, elle est pour moi !

Pour ce road trip avec mes copines du groupe Facebook Route 66,
j’ai hérité du numéro 40 :

J’ai photographié cette merveille tout juste rénovée à Williams, petite ville d’Arizona traversée par la Route 66 (nous y sommes, sur le trottoir !). En 2018, nous avions suivi la Route 66 sur plusieurs centaines de km, j’y reviendrai !

Buick choisie pour sa couleur turquoise,
et aussi pour son chauffeur,
l’Unique, the King :

 Elvis en personne !

Je ne sais pas vous, mais moi je suis fin prête pour l’aventure sur la Route 66 !

Surtout, ne me réveillez pas encore…
Katell

Pendant ma pause estivale, je risque fort de rêver encore à la Route 66… Je vous retrouverai sur le blog dans quelques semaines. En attendant, je resterai active sur Facebook, en particulier sur le groupe Quilt Météo 2020 !

30 commentaires sur « Cadillac à Detroit, Buick à Williams »

  1. Merci katell pour cet article que j’ai adoré et qui m’a appris plein de choses.
    Happy July 4th to our American friends.
    Bonne vacances katell
    Bises amicales masquées
    Florence

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  2. Mais, comment fais-tu pour nous passionner à chaque nouvel article?
    Tu m’epates toujours et encore!
    Merci ma Katell et grosses bises virtuelles.

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  3. Bel été Katell… profites-en bien pour recharger tes batteries et celles de ta Buick vintage pour affronter ton grand voyage en septembre!
    Tes récits si intéressants me manqueront pendant ces vacances…

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  4. le 4 juillet 1776 est la déclaration d’indépendance, il faut attendre 1783 pour qu’ils soient reconnus indépendants et 1787 pour la constitution…Détroit est au programme de géo de 4ème (une ville qui rétrécit) mais elle invente aussi une nouvelle façon d’occuper la ville : fermes urbaines, reconstruction, rénovation, elle est redevenue le lieux de tous les possibles…Son quartier des affaires s’appelle maintenant « Renaissance », tout un programme! bonnes vacances!

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    1. Ah merci pour ces précisions, c’est effectivement un long processus pour la constitution de la Nation et on n’en retient qu’une date… Et j’ai lu quelques articles sur le renouveau de Détroit, avec des initiatives comme tu le précises, et aussi des perspectives avec les voitures électriques je crois… Il ne faut jamais sous-estimer la capacité de rebond des Américains !
      Passe de très bonnes vacances toi aussi !

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    1. A toi également Isabelle.
      Cette année est si chargée émotionnellement – je n’oublie pas le drame qui marque ta vie à jamais – mais nous avons besoin de souffler, de rire…

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  5. Encore un régal que cet article, bien écrit, documenté et illustré. Un bonheur de te lire comme le disent tous les autres commentaires. Merci pour ce voyage qui me fait rêver. Reverrai-je un jour les USA ????

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    1. C’est une question que je me pose, c’est tellement bizarre de savoir que nos frontières sont infranchissables… Suis-je dans un cauchemar ?
      Je tenterai d’y retourner en 2021 ou 2022…

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  6. Merci pour cette magnifique page d ‘histoire…d’autant plus que j’habite à 20 km de Castelsarrasin…vous me régalez avec tous vos articles toujours superbement écrits et documentés.
    Passez un doux WE

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  7. Magnifique reportage ! Merci !
    J adore les voyages mais je ne suis jamais allée sur les terres Américaines ! Je suis plutôt côté Asie !
    Je souhaite de tout coeur une très belle fête nationale aux américains !
    Au plaisir de vous lire !

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  8. Ce 4 Juillet 2020 est une excellente opportunité de s’interroger sur les Etats-Unis et des personnages de son histoire, tel qu’Antoine Laument (dit de Lamothe Cadillac). Il est décrit en tant que personnage controversé qui a menti sur ses origines (changement de pays et nom, modification du nom de sa mère sur son certificat de mariage) et a raconté des « faits alternatifs » dans ses récits, mais a su se faire bien voir grâce à ses connaissances des côtes maritimes afin de protéger les forces Françaises contre des attaques sur Boston ou New York. Il s’est enrichi très vite en vendant de l’alcool aux Indiens et en escroquant des entrepreneurs Franco-Canadiens de l’époque en vendant les fourrures, en autre, à l’ennemi, les Anglais.
    Permettez-moi d’apporter une remarque sur l’actuel « déboulonnage/peinturlurage » des statues.
    Les USA est un pays d’immigration. Cependant, les Afro-Américains ne sont pas venus volontairement. Les Amérindiens (First Peoples) étaient déjà là et ensuite ils ont été soit décimés, soit relégués sous contrainte ou avec brutalité sur des terres peu attrayantes.
    Aux USA, les statues des personnages des Etats confédérés pendant la Guerre de Sécession ont toujours été sujet de controverse. Si vous étiez une habitante d’un bastion de la Résistance Française, aimeriez-vous voir, tous les jours, des statues de la milice Française ou le Gestapo—ce serait insupportable.
    Ailleurs, la souffrance et peine infligé sur les « First Peoples » par Christopher Columbus (esclavage, maladies, gouvernance brutale) est aussi insupportable. (Depuis 1991, « Columbus Day », célébré au 2ème lundi d’Octobre, est petit à petit remplacé par « Indigenous Peoples’ Day ».) Président Andrew Jackson a approuvé ce système de réservations et de ségrégation, voici pourquoi on a tenté d’enlever sa statue.
    Il nous faut des récits historiques moins aseptisé et plus véridique dans cette période où la nouvelle génération cherche à établir plus d’égalité entre tous.

    Je me permets de vous offrir plusieurs suggestions afin d’acquérir un portrait plus juste des régions que vous allez traverser en prenant la Route 66 :
    1) Chicago (la ville de départ) : A Public Art Project Devoted to Dismantling Racism at Every Level https://www.nytimes.com/2020/07/01/t-magazine/nick-cave-bob-faust-amends.html?referringSource=articleShare
    2) Tulsa, Oklahoma : Comprendre le massacre de 1921 des Noirs à Tulsa Greenwood Cultural Center (322 N Greenwood Ave); Black Wall St; John Hope Franklin Reconciliation Park
    3) American Indians & Route 66 : Télécharger la guide gratuit en PDF (à la fin de l’article) afin de comprendre les terrains que vous allez traverser sur la Route 66 https://www.route66news.com/2016/04/18/american-indians-route-66-guide/
    4) Future Centre Culturel Indien va ouvrir à Oklahoma City en 2021 : https://oklahoman.com/article/5613264/board-looks-ahead-to-resumption-of-construction-at-the-american-indian-cultural-center-and-museum
    Bien cordialement,
    Catherine Coolidge

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    1. Merci Catherine pour toutes ces précisions. Ce n’est effectivement pas sur Wikipedia que j’ai trouvé les plus fortes attaques détaillées sur Antoire Laumet, mais sur des sites canadiens, dont un qui le nomme « fieffé coquin »… Vous avez bien résumé l’ambivalence du personnage, et ce n’était pas le seul a avoir émigré pour profiter de la liberté que procuraient les grands espaces et un gouvernement lointain. Je n’ai pas voulu en faire un héros absolu, il avait sa large part d’ombre.

      Très sensibilisée à une meilleure compréhension de l’histoire de votre pays depuis mes études universitaires, je suis heureuse de ce que vous dites à la fois sur les Afro-Américains et sur les peuples indigènes d’Amérique, c’est le cœur de deux de mes conférences de Journées de l’Amitié pour France Patchwork et j’espère que j’aurai un jour la chance de vous y rencontrer ! Je parle assez longuement de ce mouvement dénonçant l’invasion de Christophe Colomb. Passé le temps de sidération, ce point de vue se comprend bien et force l’empathie, même si ce n’est pas cet homme-là qui a fait le plus de mal… Les diverses colonisations ont montré l’arrogance, l’égocentrisme des Européens, mais c’est dans les gènes de l’Homme sans doute. En remontant bien plus loin, les Homo Sapiens ont probablement fait disparaître directement d’autres hominidés et quantité d’animaux en se déployant sur l’ensemble des continents…

      Prenez-vous la Route 66 avec le groupe constitué par Patou Pat ? Ce serait fort intéressant ! En tout cas j’ignorais qu’un centre culturel indien ouvrira en 2021 à Oklahoma City, c’est une excellente nouvelle, il y aura certainement beaucoup à (re)découvrir sur les Osage et leurs magnifiques parures en rubans !

      Bel été Catherine !

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  9. Comme toujours on continue à feuilleter un livre aux milles histoires toutes aussi passionnantes que diverses.
    Merci Katel et bonnes vacances à vous toutes
    Amicalement Evelyne

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