Rencontrez Sheila !

Je ne vous parle pas de la chanteuse française mais d’une Américaine, Sheila Frampton Cooper… C’est une quilteuse dont j’ai déjà fait l’éloge dans un article sur les quilts cartographiques.sheila frampton-cooper

Communiqué :
Dans les « Jardins de Magali », trois artistes américaines, Sheila Frampton Cooper, Sue Rasmussen et Caryl Bryer-Fallert présentent leurs œuvres de patchworks du 8 au 18 mai. Elles ont été souvent primées dans des concours aux USA. Sheila Frampton Cooper a fait la une des grands magazines de quilts avec son travail qui joue sur les formes et les nuances de couleurs. Son style nouveau et original a bouleversé l’art du quilt. Elle dirigera son premier stage du 15 au 18 mai à Lauris. 

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Quilt de Sue Rasmussen
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Quilt de Caryl Bryer-Fallert, Migration
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Life in the City, Sheila Frampton Cooper

C’est la première fois que ces artistes exposent en France. Révervez-leur le plus chaleureux accueil !

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Stage de patchwork avec Sheila Frampton Cooper
du 15 au 18 mai de 9 à 12 heures.
Si vous pouvez y aller, je serai absolument ravie de connaître vos réactions. Il reste quelques places, manifestez-vous si vous habitez dans la région !

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Exposition de Patchwork-Quilts

Jardins de Magali – 5 avenue Philippe de Girard / 84360 LAURIS

arts.lauris@gmail.com
jardins-de-magali.over-blog.com

Au Fil d’une Passion, le cheminement d’une vie parmi les textiles

Quelle joie d’apprendre dans le programme de Patchwork Europe (Sainte-Marie-aux-Mines) que cette année, Anne Woringer présentera ses 30 ans d’oeuvres textiles ! Je la connais depuis bien longtemps… uniquement grâce aux articles qu’elle a écrits ou qui lui sont consacrés, son implication dans France-Patchwork les premières années, et puis son extraordinaire livre édité par Quiltmania, dans lequel elle se livre à la lectrice comme si nous étions sa meilleure amie…Livre AW

Tant de réflexions de son auto-biographie pourraient être miennes : c’est troublant car je ne sais plus la part de ce que j’ai appris par elle au fil des ans. En lisant son livre, j’ai pensé qu’ Anne Woringer a sérieusement déteint sur moi ! Je n’ai malheureusement pourtant pas encore « lâché les chevaux », mes créations restent rares et timides, mais une partie de moi ressemble beaucoup à ce que fait cette artiste, une autre étant bien plus colorée, spontanée et décontractée…SAM_0420

Belle photo prise à Nantes par Dominique Lucat

Contrairement à ce qu’elle affirme, je trouve qu’elle a un style bien reconnaissable et un cheminement artistique finalement bien logique. Est-ce que parce que j’ai appris dans les Nouvelles du Patchwork chaque tournant de son inspiration créatrice ? Parmi ces quelques oeuvres ci-dessous, nous voyons la liberté qu’Anne Woringer prend très vite avec les gabarits… Mais dès le début, la captation de la lumière est réussie !flux-et-reflux

Flux et reflux, 1988.

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claustra III, 1990farniente

Farniente, 2008, broderies main.détail farniente

Oui, je répète, tout est brodé à la main… y compris ces rangées de chaînette !

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Abysses, 2009. Les broderies (toujours à la main) font penser aux Molas abstraites que l’artiste collectionne depuis très longtemps.fleurs-de-corail

Superbes fleurs de corail brodées à la main sur un fond indigo africain. Si vous lisez le livre, vous en saurez plus sur les affres de cette création ! (2010). Comment voulez-vous que je résiste à ces oeuvres d’art ? Corail et indigo, brique et pastel, ces associations vibrent en moi !

J’espère que j’aurai l’opportunité de lui dire mon admiration de vive voix en septembre prochain à SMM !signature

(Signature d’Anne Woringer)

Love Emblem

Fêtons demain ensemble la Saint-Valentin avec modernité ! Voici un bouquet d’une jeune styliste très connue de la jeune génération, Anna-Maria Horner :12207273716_5641e24e53Son dernier bouquet de fleurs, fond « en sourdine »,  évoque la gaieté d’un bouquet champêtre et son style, gypsy-modern-chic, m’apporte toujours un brin de bonne humeur !

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Et pour ce jour dédié à l’amour et l’amitié voici ce cœur, « Love Emblem« , qui donne tant d’énergie ! Patron gratuit ici : http://www.annamariahorner.com/love.emblem.pdf

5078979610_93f30525f2_oLove, Enjoy…

Son blog : http://annamariahorner.blogspot.com/

La sirène apprivoisée

Pardon Marie-Christine si vous ne vous reconnaissez pas dans ce titre, mais vous rencontrer, vous et vos belles œuvres, avait pour moi un parfum d’océan, de petits riens glanés sur la plage avec l’odeur iodée persistante…

La faute à vos tableaux : votre don pour évoquer l’écume du temps et de la mer, votre imagination pour mettre en scène les coquillages, les cordages ou masses solides incongrues trouvées à marée basse lors de vos longues balades sur la plage… Plusieurs de vos œuvres exposées avaient aussi les couleurs changeantes qu’en Bretagne on appelle « glaz », ce fameux bleu-vert grisé de la mer et du ciel. Alors voilà, femme de l’océan, vous savez évoquer ce milieu comme si vous y viviez.

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Evocation de l’écume du bord de mer, oeuvre textile de Marie-Christine Hourdebaigt

Je suis loin d’apprécier à sa juste valeur l’art textile moderne, mais le vôtre a eu une résonance en moi, j’ai apprivoisé un peu grâce à vous ce domaine qui m’est étranger.
Vous m’avez intéressée avec vos longs essais de teintures, chimiques comme naturelles, vos tâtonnements avec diverses plantes, divers tissus… J’ai compris votre envie d’intégrer tant de matières qui ont chacune un effet unique…
Nous avons partagé, France-Patchwork et vous, la même galerie lors du Salon des Tendances créatives de Toulouse ; partage apprécié par un public nombreux et justifié puisque vous êtes, comme la plupart des artistes textiles françaises, adhérente de FP ! Et au-delà de l’admiration que j’ai portée à vos œuvres est née de la sympathie entre nous. Merci pour ces moments -trop courts !

C’est Marie-Christine Hourdebaigt que j’ai rencontrée à Toulouse. Elle a fait également des œuvres aux couleurs très chaudes, et aussi des tableaux inspirés de maîtres japonais… Découvrez sa page sur le site Arts Up (site communautaire pour artistes) : vous verrez bien que ses inspirations sont beaucoup plus étendues et variées que celles de l’océan ! Je m’autorise cependant à garder d’elle cette image de fille de la mer…

CATHERINE et ses log-cabins à la française

Marie-Françoise Catherine a choisi son patronyme (Catherine) comme pseudo d’artiste, d’où les majuscules. Depuis des décennies son terrain de jeu est le bloc qui est  la quintessence du patchwork américain, le log-cabin. Elle est cependant bien plus connue dans le monde des artisans d’art que dans celui du patchwork français en dépit de l’appartenance à France-Patchwork depuis ses tout débuts en 1984, je souhaite donc vous la faire découvrir, sa maîtrise vaut d’être reconnue !

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Après de nombreux quilts aux centres de blocs rouges comme le veut la tradition, Catherine a exploré d’autres mises en scène du log-cabin qui se prête si bien à d’infinies variations. Cependant elle ne les maltraite pas, ne les coupe pas ni ne les tord… Elle reste fidèle aux croisements à 90°. Mais ses bandes se font plus fines, ses coutures sont d’une précision extrême au fil près (sans couture sur papier ou autre support !), ce qui donne un effet quasi-hypnotique et une allure finalement bien française, comme un jardin aux bordures de buis taillés au cordeau.
Catherine a progressivement abandonné le quilting car ses œuvres sont maintenant tendues sur châssis afin d’être encadrées. Elle explore aussi parfois la possibilité d’utiliser des antiquités en bois qui servent alors de cadre pour un log-cabin sur mesure.

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Persévérance, Patience, Passion,
telle est sa devise !

prix catherineQuelques œuvres sortent de la rectitude du log cabin malgré tout. Ainsi, les lumineux boutons de nacre lui inspirent des tableaux en rondeurs féminines, des soies l’entraînent vers des paysages rêveurs… Sa recherche sans cesse renouvelée de la capture de la lumière lui font utiliser de façon de plus en plus libre maints textiles mats ou soyeux, ce qui lui vaut un public fidèle et la reconnaissance de son travail professionnel. Le public toulousain ne s’y est pas trompé, son exposition a été grandement appréciée !

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Marie-Françoise Catherine parmi quelques œuvres récentes exposées au Salon des Tendances Créatives de Toulouse d’octobre 2013. Merci, Catherine, d’avoir répondu à ma curiosité et accepté d’être photographiée !

Son site : http://mosaicartextile.fr

Deborah Hyde joue avec des carrés d’un pouce

Maryline, abeille quilteuse mais surtout peintre, est allée à NYC au printemps dernier. Elle n’a pas manqué de visiter l’unique magasin de tissus de patchwork de Manhattan, The City Quilter. 

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Vérifiez les jours et horaires d’ouverture ici si vous souhaitez rendre visite à cette institution !

Maryline a découvert, émerveillée, l’extraordinaire choix de tissus rangés par style.

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Elle qui aime les imprimés modernes,  elle y a eu un choix inédit ! Mais son coup de foudre fut l’exposition temporaire de l’artiste textile Deborah Hyde. Ce n’est que vu de près qu’on se rend compte que ces tableaux expressifs sont… des quilts, constitués de milliers de mini-carrés de tissus coupés à 1 inch (= pouce, soit 2,53 cm environ).

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Sunshine  & Shadow beige. Sur une base de modèle classique de patchwork se dessine un corps de femme. L’artiste insiste sur le fait qu’elle travaille de manière artisanale, sans ordinateur ni pixellisation d’image. Son inspiration lui vient de ce qu’elle voit, ce qu’elle dessine, ce qu’elle ressent.

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Sunshine & Shadow yellow. Sur le même principe que la photo précédente, un portrait de femme est inclus dans le quilt.

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Jeanne. Quelle joie de vivre émane de ce portrait !

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Floating Nude. Inspiré d’une sculpture de Rodin.

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Tout en fraîcheur, encore une belle image de femme : The girl with the Blue Headband. Un petit clin d’œil sans doute à Vermeer et sa Jeune Fille à la Perle (en anglais : The Girl with a Pearl Earring) qui elle, porte un turban bleu !

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Encore un très beau portrait tout en subtilité, assurément un de mes préférés, Sunshine & Shadow Turquoise.

Venons-en à la technique. Deb Hyde travaille d’une manière qui force l’admiration, pièce après pièce, jusqu’au rendu souhaité. Elle a bien sûr une réserve phénoménale de tissus de toutes les couleurs ! Ce sont des centaines d’heures de préparation.
Ensuite vient l’assemblage. Son « truc » est de poser ses carrés de tissus sur une pièce de non tissé thermo-collant Vlieseline avec une grille imprimée, de façon à pouvoir fixer au fer à repasser les carrés à leur place définitive. Cela ne la dispense aucunement de les assembler ensuite à la machine, verticalement puis horizontalement. Vous avez ici une vidéo montrant cette technique : Vlieseline Pellon Quilter’s Grid.

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Deb Hyde auprès d’une de ses oeuvres en cours : les carrés sont tous disposés sur le non-tissé mais pas encore assemblés, ce qui réduira considérablement la taille du quilt en raison des innombrables marges de couture. Ici, le tableau mesure 198 x 244 cm.

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Fini, le Neck Study ne mesure « plus que » 109 x 129 cm. La surface est réduite aux 3/4 !!

Le résultat est épais, les carrés ont du volume. Cela ne dispense pas Deb Hyde d’accorder à chaque oeuvre un quilting approprié très recherché, parfois géométrique, parfois en quilting libre.

Espérons que cette artiste sera un jour invitée en Europe !
Merci Maryline de m’avoir fait découvrir cette artiste…

L’Invitation au Voyage

Maurice Ravel, basque par sa mère, est né à Ciboure, petite ville portuaire qui partage la baie avec St-Jean-de-Luz. C’est l’enfant du pays, même s’il passa toute sa jeunesse à Paris. Ses musiques m’enchantent et ce que j’aime particulièrement de lui, c’est son éclectisme, sa soif de sons d’ailleurs pour mieux les intégrer à sa culture française. 

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Ce portrait de Ravel évoque les multiples influences de ses musiques

Lors d’une immense tournée en 1928 aux Etats-Unis et au Canada, il fit cette déclaration : « Vous, les Américains, prenez le jazz trop à la légère. Vous semblez y voir une musique de peu de valeur, vulgaire, éphémère. Alors qu’à mes yeux, c’est lui qui donnera naissance à la musique nationale des États-Unis. »

Bien vu ! Il avait notamment sympathisé avec George Gerswhin dont les sonorités de sa Rhapsody in Blue l’enthousiasma, alors que les critiques pleuvaient encore sur cette « musique de nègres ».

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Si son imaginaire musical majeur vient d’Espagne (le Boléro, qui envoûte ou énerve, reste la musique française la plus jouée au monde), ses œuvres sont profondément originales et éclectiques, inspirées successivement des folklores de la Russie, la Grèce, les sonorités orientales ou tziganes…

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Célèbre ballet de Béjart sur le Boléro de Ravel

« L’art, sans doute, a d’autres effets, mais l’artiste, à mon gré, ne doit avoir d’autre préoccupation que la perfection technique. L’important est de s’en approcher toujours davantage. » Ravel… C’était un travailleur lucide, exigeant envers lui-même et les autres, qui déclara :  « Oui, mon génie, c’est vrai, j’en ai. Mais qu’est-ce que c’est ? Eh bien, si tout le monde savait travailler comme je sais travailler, tout le monde ferait des œuvres aussi géniales que les miennes. ». A méditer quand on croit qu’on peut faire des œuvres vite faites-mal faites, sous le couvert de modernité !

Ravel aimait lire Beaudelaire : « Là, tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté. » (l’Invitation au Voyage)

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Je ne peux éviter ici d’évoquer deux sœurs pianistes nées tout à côté, à Bayonne, qui interprètent dans le monde entier des œuvres aussi diverses que celles de Ravel, Gerschwin, Mozart ou le répertoire baroque, mais aussi le rock expérimental avec grâce et un talent fou… qu’elles reconnaissent couplé à un travail acharné. Les ayant rencontrées à 19 ans, âge où nos goûts se forment pour la vie, je collectionne leurs enregistrements et leur voue une admiration sans faille. Elles se font malheureusement très rares en France…

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Travailleuses, éclectiques, talentueuses… et si belles ! (©KLM recordings)

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Le hasard faisant bien les choses, Marie-Claude Tsuruya cohabita avec Maurice Ravel pendant Quilt en Sud. C’est en effet dans l’auditorium Maurice Ravel que le Japon s’installa à Saint-Jean-de-Luz avec une sélection de quilts de la Chambre des Couleurs.

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Parions que Ravel aurait adoré cette cohabitation : l’excellence du travail, l’alliance de deux cultures, sont des caractéristiques ravelliennes  tout comme celles de cette quilteuse ! Marie-Claude Tsuruya n’a pas de télévision mais coud et quilte toujours au son de la musique. Quelques articles de son blog sont consacrés à cette autre passion.

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Plusieurs kimonos précieux, en soie ou en « chirimen » (tissu légèrement ondulé, une sorte de crêpe agréable à porter et facile à entretenir) agrémentaient cette exposition. Les kimonos japonais sont coupés et cousus d’une manière immuable (sujet d’un prochain article dans le blog de Marie-Claude sans doute !), il en résulte un vêtement très long qui sera ajusté à la taille de la personne grâce à la ceinture (obi). Marie-Claude avait apporté son obi de mariage mais dès le premier jour, elle l’a enlevé de l’exposition en raison de trop nombreuses petites mains qui ne pouvaient s’empêcher de le toucher !

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Détail d’un quilt de mini-blocs en T, initiale de leur nom de famille. Chaque T est cousu à la main avec un tissu japonais récent ou ancien, sur un fond d’indigos. Finalement, cela donne plutôt une jolie collection de mini-kimonos !

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Enfilade de quilts tous plus beaux les uns que les autres ! De près, ils sont parfaits, de loin on découvre une autre dimension avec des jeux de lumière insoupçonnés… C’est pourquoi j’appelle Marie-Claude Tsuruya la créatrice de lumière.

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Les quilts exposés ont tous un lien avec le Japon. L’époux de Marie-Claude étant japonais, elle hérite des tissus de sa belle-famille, surtout ceux dont personne ne veut plus ! De chaque voyage elle rapporte des kilos de textiles qu’elle achète aussi pour compléter sa collection. Le quilt ci-dessus,  en cotons bicolores marine/blanc, étaient destinés aux yukata, kimonos d’été aux imprimés plutôt masculins  (à l’origine, ces kimonos étaient pour la sortie du bain).

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Quilts récents de Marie-Claude. Son goût pour les tissus recyclés, ayant la trace du passé, se confirme dans ces ouvrages. On y retrouve des tissus d’épaisseurs différentes que beaucoup de quilteuses hésiteraient à unir, mais finalement coton, lin, chanvre ou ramie cohabitent avec bonheur !

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Je me souviens que, tandis que je donnais un stage sur le « nine-patch évanoui », une variante amusante de coupe rapide avec cutter et règle, Marie-Claude confectionnait ce même bloc de manière patiente, artisanale, choisissant avec précaution les morceaux pas trop usés de ses tissus anciens du nord du Japon, étoffes d’un peuple fier et travailleur. C’est ainsi un bel hommage qu’elle rend aux personnes qui filèrent, teignirent, tissèrent artisanalement ces textiles. Quand on voit ce quilt, on comprend d’autant plus ses réticences sur le phénomène Boro, ou la mise sur le marché  de guenilles, parfois même artificiellement vieillies, qui se vendent à des prix exorbitants… Tandis que les visiteurs  occidentaux s’extasient, les Japonais se sentent parfois humiliés…

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Encore cette association dont je ne me lasse pas, les indigos et les imprimés joyeusement colorés ! 

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Beauté d’un sobre Log Cabin. Contrairement aux tissus de patchwork, les bleus teints à l’indigo ne s’affadiront pas en quelques années !

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Finissons ce petit tour par ce magnifique quilt qui vous dit sans doute quelque chose… Il est inspiré d’un top en soie et satin fait par Ella Holcombe (1872-1957), qui fut offert au Musée Shelbourne en 1990 et immédiatement admiré et recopié ! On ne sait pas quand la quilteuse cousit ce top, mais le modèle du bloc existe depuis la fin du XIXe siècle. Dominique Husson le reproduisit en coton avec infiniment de subtilité (voir article précédent). Si vous aussi vous souhaitez vous lancer dans cet extraordinaire quilt, cherchez le Quiltmania n° 21, Renée Ferré l’a présenté en fiche « pas à pas ». Celui de Marie-Claude a la particularité d’être en soies de kimonos, ce qui lui donne une présence lumineuse et chaque bande est quiltée en son milieu… Association encore de l’occident et de l’extrême-orient, ce quilt est baptisé « Temari », du nom des balles japonaises de décoration qu’on sort pour certaines fêtes. Plus de renseignements sur ce quilt dans le blog  ici.

Guettez les prochains articles de Marie-Claude ! Elle nous donnera ses impressions de son voyage plein sud… Je sais qu’elle a adoré rencontrer ses lectrices et revoir les personnes rencontrées en avril 2012 à Pibrac lors de la Journée de l’Amitié… Des liens d’amitié qui se tissent au fil du temps !

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De Quilt en Sud, je ne vous en montrerai pas plus ; d’autres artistes, avec qui je n’ai pas pu m’entretenir, présentaient eux aussi des merveilles ! Vous pouvez aller voir ces blogs et sites pour d’autres points de vue :

– le reportage-photos d’Edith Bouilly sur le blog News FP
– les reportages de Marie-Christine sur le blog Carrément Crazy, très intéressants avec de belles photos
– les photos (articles en cours) sur le blog de France-Patchwork Tarn
– le blog de l’artiste Françoise Christien
– l’art textile léger et pétillant des Espagnoles Desedamas
– l’univers d‘Hubert Valéri, si raffiné, dont je vous montre ici la couverture du livre qui paraîtra en octobre prochain :

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Livre préparé avec Maryse Allard

… et il y en avait tant d’autres ! Merci à tous ces artistes de nous avoir enchantés !

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Voyages décousus* autour du Monde

Depuis quelques mois, de nombreuses quilteuses américaines s’affolent autour d’un modèle de la Reine du Scrap Bonnie Hunter, qui date pourtant de 2005 déjà. Il s’agit de « Scrappy* Trips around the World » qui moi aussi m’enthousiasme ! Ses explications sont lumineuses avec ses multiples photos. Si vous souhaitez vous lancer en centimètres, les bandes à découper sont de 6,5 cm x 40 cm (39 + 1 cm d’ajustement). Surtout ne négligez pas le sens de repassage des bandes, c’est LE truc qui vous permettra de réussir un superbe quilt !

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Quilt de Bonnie Hunter

Pour se donner des idées, se motiver et s’entraider, un groupe existe sur Flickr, vous pouvez y visionner plus de mille  six cents photos de scrappy trips et pourquoi pas vous y inscrire !

Tandis que les « petits voyages », faits de 4 blocs, rivalisent de beauté, certaines quilteuses préfèrent disposer ces blocs de manière différente, soit très traditionnelle, soit plus personnelle. LeeAnn, de Nifty Quilts, en a récemment terminé un, disposé « à l’ancienne », c’est-à-dire avec un centre unique :

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Superbe effet scrappy chez Nifty Quilts !

C’est cette option que j’avais aussi préférée pour le quilt fait pour la colocataire de ma fille :

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J’ai bien aimé faire un grand centre très coloré pour finir avec des bleus en bordure.

Ensuite, LeeAnn  de Nifty Quilts a succombé au plaisir d’en faire un aux multiples centres, tout en rouge :

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J’adore ce quilt tout rouge de LeeAnn !

Moi aussi j’ai préparé des carrés pour faire ce modèle mais je me perdais dans les infinies possibilités que vous pouvez voir ici. Tout a été rangé dans un carton jusqu’à ce que, récemment, l’envie me prit de ressortir ces carrés aux couleurs de brique et de pastel… toujours en préparation, mais je n’ai jamais été aussi proche de la fin 🙂

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*Scrappy se réfère dans le monde du patchwork au principe d’utiliser un maximum de tissus, le plus souvent des restes d’autres quilts ou de la récupération. Pourtant dans l’anglais courant, il peut se traduire par « décousu », « brouillon », « incomplet »… D’un mot péjoratif les quilteuses en font fait une notion enthousiasmante !

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Brique et Pastel

Aujourd’hui je lance un clin d’œil à Toulouse ma ville natale (oui, je suis mi-bretonne, mi-cathare ;-)), à la couleur de brique rose et à sa fortune faite grâce au Pastel, alias Isatis tinctoria…

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Toulouse, ô Toulouse… Au bord de la Garonne

C’est une ville construite avec la terre argileuse de la région, ce qui donne ces briques rosées si belles. La terre d’ici continue d’être cuite, notamment à 5 km de chez moi, en briques traditionnelles. On les appelle ici « briques foraines », cuites au four, en opposition avec les briques de terre crue. Son complément naturel est, pour les toits, la tuile « canal », composée de la même matière première. Ces couleurs naturelles donnent à ma ville une nuance rose le matin, rouge sous le soleil de midi et pourpre aux derniers feux du soir… Quelle harmonie !

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Les nombreux hôtels particuliers qui contribuent à la beauté de la ville sont redevables des fortunes amassées grâce au pastel, plante tinctoriale qui pousse si bien dans la région voisine du Lauragais, dans le triangle d’or formé par Toulouse à l’ouest, Albi au nord et Carcassonne au sud. La plante pousse facilement partout ou presque, mais c’est ici que les conditions (climatiques, géologiques) sont réunies pour obtenir le plus beau bleu !

Cette teinture est utilisée depuis des temps immémoriaux. Savez-vous que des Ecossais (le peuple Picte, qui a vraiment existé), du temps du Roi Arthur et de Merlin l’Enchanteur, se badigeonnaient de teinture de guède (autre nom de l’isatis) pour devenir bleus et effrayer leurs ennemis anglais… qui en avaient une peur bleue ?  Cette teinture servait aussi à teindre la barbe blanchissante de certains hommes en Europe, d’où sans doute l’origine de Barbe Bleue, celui qui fait si peur…

 

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Du Capitole aux maisons modestes, des hôtels particuliers aux maisons de banlieue, le bleu pastel s’impose de plus en plus en compagnie de la brique.

Le déclin de la fortune de la région toulousaine vint avec l’importation d’Asie de tissus teints à l’indigo à partir du milieu du  XVIe siècle, plante qui contient une plus grande concentration du fameux pigment « indigotine ». Mais depuis la fin du XXe siècle, avec la mondialisation, on s’attache de nouveau aux particularités régionales. Tout comme la violette (fleur emblématique de Toulouse), le bleu pastel revient en force  ! Aux pigments naturels ou en peinture industrielle, le bleu est maintenant la couleur majoritairement utilisée pour les boiseries et les ferronneries des immeubles en briques dans tout Toulouse. C’est si beau ainsi !

 

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Dans le fameux jardin de Monet à Giverny (aux portes de la Normandie), on apprécie ce nuage de fleurs jaune d’or, les isatis, qu’on appelle aussi guède ou pastel des teinturiers. On nomme cette plante ainsi car, à la suite d’un savant processus, on peut extraire des feuilles le pigment de l’indigotine, seule source de teinture bleue en occident pendant des siècles. Selon la concentration, le bleu sera pastel, ou bien plus dense.

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Champ de pastel dans le bas Lauragais (on dirait du colza, c’est de la même famille), avec vue sur les Pyrénées ! (photo d’ici). Savez-vous que c’est ici le  fameux Pays de Cocagne ? Cette expression provient des boules de feuilles broyées, appelées coques, qu’on moulait à la main pour stocker cette matière en vue de la teinture en bleu, la fortune de la région… l’Or du Pastel !

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Paule de Viguier, née en 1518 à Toulouse, est une figure emblématique de l’imaginaire toulousain. Cette dame de la famille Lancefoc, pastelliers fortunés, fut louée pour sa beauté par François 1er en visite à Toulouse et devint une icône de la ville. Alors que des troubles secouaient le peuple toulousain, les Capitouls (magistrats de la ville) demandèrent à la Belle Paule de se montrer régulièrement à la foule du haut d’un balcon… et ainsi l’apaiser momentanément ! Une vraie star !… Paule profita de sa fortune et de sa réputation pour mettre en valeur les artistes dans cette époque encore très frustre et contribua ainsi à l’éveil de la culture dans la ville. Contrairement à Clémence Isaure, l’autre égérie de Toulouse, la Belle Paule a bel et bien existé.

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Aucun portrait réel de la Belle Paule n’existe, mais elle a inspiré notamment Henri Rachou (1855-1944)

Cette belle Dame est toujours représentée habillée en bleu pastel, conformément à l’origine de sa fortune. Aujourd’hui, son nom est attaché à l’hôpital de la Mère et de l’Enfant, au sein du CHU de Purpan.

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Largement planté depuis le XIIe Siècle dans le Lauragais, le désamour du pastel à partir du XVIe Siècle plongea la région dans un certain marasme. Du côté de Lavaur dans le Tarn se trouve le Musée du Pastel au Château Magrin qui évoque grandeur et décadence de l’Or Bleu. Coïncidence, mes parents se marièrent à cet endroit !

Le pastel, woad pour les anglophones, connaît depuis une quinzaine d’années un renouveau fracassant grâce tout d’abord à un couple belge installé à Lectoure dans le Gers. Parallèlement, d’autres jeunes sociétés ont vu le jour pour tirer profit des immenses qualités cosmétiques de la graine de cette plante, comme par exemple Graine de Pastel dont j’adore les produits bleus !

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Ambiance « Bleu de Lectoure », vues du site de l’ancienne tannerie transformée par la famille Lambert en magasin et atelier. Même leur vieille Jaguar est peinte en bleu !

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Nouvelle cosmétique élaborée avec un engagement écologique et éthique forts.

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Si vous souhaitez plonger dans une journée de teinture au pastel, vous pouvez contacter Annette Hardoin !

Il n’est pas étonnant que ce bleu divin inspire les artistes de la région… Cécile Milhau, artiste peintre-quilteuse-brodeuse(…) habitant dans le Tarn, dans le fameux triangle historique du pastel, initia en 2002 un travail collectif avec ses amies quilteuses : sur ce grand panneau textile se trouvent différents symboles des pasteliers, on devine des bâtisses, des horizons, des paysages, la plante aux fleurs d’or… Cerise sur le gâteau, des tissus sont teints artisanalement au pastel !

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« Le Pastel », quilt créé par Cécile Milhau, réalisation collective, 220 cm x 220 cm, 2002

De surcroît, on a des chances d’entendre encore plus parler de l’isatis tinctoria dans les prochaines années car le principe anti-cancéreux du broccoli est dans cette plante en concentration vingt fois supérieure ! Elle fait partie de la famille des brassicacées, comme les choux… Bientôt la soupe au pastel des teinturiers ???

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Bien plus modestement que Cécile Milhau mais néanmoins inspirée par mon environnement de brique et de pastel, le nom de mon ouvrage en cours s’est imposé à moi… J’y travaille et je vous le présenterai bientôt !

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En France, le froid arrive…

… et j’ai trouvé sur Facebook un quilt qui illustre l’hiver à merveille :

felisa quilt : Minka in Invierno

« Minka Houses in Winter » : Felisa Nakawasa a dessiné ce modèle réalisé par Shisuyo Tuchihashi. Felisa fait régulièrement éditer ses modèles dans les magazines de patchwork japonais les plus réputés et a reçu maintes récompenses.

Les « Minka » sont au Japon des maisons traditionnelles, généralement les habitations modestes des paysans, pêcheurs, artisans et marchands. Leur style varie grandement selon la région mais les plus connues sont au centre du Japon où quelques villages, inscrits par l’UNESCO au patrimoine de l’humanité, sont préservés :

Village historique au centre du Japon

(photo du site de l’UNESCO)

Les toits de ces Minka sont extrêmement pentus car l’hiver, la neige tombe fortement dans cette région. Certains descendent presque jusqu’au sol et cette architecture est appelée « gassho-sukuri », c’est-à-dire en forme de mains jointes. Les toits pentus sont à la fois utiles à l’extérieur (intempéries) et à l’intérieur (fonction de cheminée !). Je vous recommande la lecture du blog de Jacques Perrin à ce sujet.

gassho_zukuri

Maison Minka… ou le charme de la couleur taupe

Cette représentation de la Maison est, pour le peuple japonais, une image traditionnelle ancrée dans les esprits. On peut rapprocher cette image culturelle à celle de la « petite école rouge » aux Etats-Unis. Il faut peut-être trouver ici l’inspiration des tissus japonais taupe pour le patchwork, car c’est bien dans cette gamme de couleurs qu’apparaissent ces maisons en bois au toit de chaume !…

houses yoko saito

Ce livre, au succès fou amplement justifié (traduit du japonais par Osamu & Marie-Claude Tsuruya) comporte de nombreuses maisons de style « Minka », ces maisons habitées par les « gens du peuple » ruraux ou citadins.

Dans le sud du Japon, les Minka n’ont pas les mêmes caractéristiques car elles sont adaptées au climat ; les toits sont moins pentus et elles sont souvent construites sur pilotis pour favoriser la ventilation… mais aussi, tout comme plus au nord, en raison des séismes…

architecture traditionnelle sur pilotis

Ces habitats traditionnels ont été massivement démolis au XXe siècle mais de nombreuses personnes et associations les protègent et les reconstruisent actuellement. Leur charme opère… et après tout, en plus de leur valeur historique, ce sont de parfaites maisons écologiques ! 

Pour le regard unique d’une Française quilteuse connaissant le Japon de l’intérieur, allez sur le blog de Marie-Claude Tsuruya La Chambre des Couleurs.

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EstampeHiroshige

Estampe de Hiroshige, Sur la route du Tokaïdo, Kambara
« Neige de nuit » – Des maisons Minka sous la neige. Je crois presque entendre la neige crisser sous les pas…

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