La Ronde des Pétales

J’aime beaucoup le style de Kathleen Tracy, certes nostalgique, tourné vers le glorieux passé du patchwork traditionnel aux Etats-Unis, mais toujours harmonieux et attachant, il suffit de voir l’immense succès de ses livres, de son blog et de son groupe virtuel consacré aux mini-quilts traditionnels ! J’avoue trouver beaucoup de plaisir à participer aux discussions avec elle et ses fans.

Mais, contrairement à Kathy, je ne m’épanouis pas vraiment dans les mini-quilts, j’ai toujours envie d’ajouter des rangées, continuer le piéçage de peur sans doute que mon travail semble trop étriqué… Alors, j’aime copier Kathy en agrandissant ses belles idées !

J’avais commencé à coudre des Orange Peels* de taille mini, puis j’ai été séduite par un échange sur internet proposant ce même modèle en plus grand. L’aubaine pour étendre la variété de tissus ! Le modèle choisi est en couverture d’un des livres à succès de Kathy Tracy :

Ce mini-quilt est fascinant à la fois grâce aux arrondis qui se répondent, les nombreux tissus utilisés, la bordure à l’imprimé « vagues », un concentré de réussite !

48 blocs faits, expédiés, puis 48 blocs reçus d’autres quilteuses, puis un large complément rapidement cousus pour arriver à 100 Orange Peels, et voici mon top tout juste assemblé :

Le modèle de Kathy étant tellement joli, j’ai cherché à m’en approcher et ai trouvé un tissu lui aussi en forme de vagues qui complétait bien le centre. Puis j’ai ajouté des tulipes aux coins, ces fleurs si parfaites graphiquement qu’elles sont sans doute les favorites dans le monde du patchwork et de l’appliqué !

Je n’imaginais pas pouvoir trouver de temps pour le quilter à la main, j’ai donc fait confiance à ma nouvelle machine à coudre et me suis lancée. Résultat mitigé : les bordures sont très réussies mais le centre, c’est-à-dire le principal, aurait pu être bien mieux !

Vous avez ici un détail de la bordure ainsi que le dos fait de tissus bleus de tous horizons !

La Ronde des Pétales, un quilt idéal pour lire tranquillement dans un coin retiré du jardin, quand l’herbe de la prairie n’est plus que paillasse…

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*Orange Peel est le nom d’une famille de blocs rappelant un morceau de peau d’une orange découpée au couteau, comme si l’on suivait les méridiens du globe terrestre. Pour la petite histoire, ce bloc est aussi lié au Marquis de Lafayette qui, habitué aux bonnes manières à la Cour de France, épata un ensemble de notables à Philadelphia en coupant ainsi son orange à la fin d’un banquet en son honneur. Une jeune femme récupéra les quatre morceaux d’écorce et en fit un bloc à la gloire de ce grand homme !

Gabrielle Paquin et les tissus inattendus

S’il y a des tissus qui font peur aux quilteuses, ce sont bien les tissus rayés. Loin des réminiscences du Moyen-Age où les rayures étaient signe d’exclusion ou de méfiance*, les tissus rayés sont, pour toute couturière ou quilteuse, réputés difficiles à travailler, difficiles à faire correspondre, difficiles à marier. Pourtant Roberta Horton les revalorisa en même temps que les écossais dans un livre à tendance scrappy-country**, de nombreux exemples réussis de recyclage décontracté des chemises ont été exposés, mais personne ne sait les mettre en valeur comme Gabrielle Paquin.

Ragtime (100 x 125 cm ), des gris et des rouges pour évoquer cette musique saccadée, gaie et dynamique

Tissus inattendus dans le patchwork, les rayures inspirent Gabrielle. Pourquoi donc ? Au vu du résultat, je me rends compte de la richesse des effets de lumière rendus par ces hachures et observe le même phénomène qu’avec la peinture impressionniste : d’un peu loin, les couleurs des rayures se fondent pour donner une troisième couleur. Par leur nature même, les tissus rayés jouent sur la luminosité et donnent une texture dense, travaillée, aussi bien en toile de fond qu’en sujet principal. Parfois quand même, on a un filet de tissu uni, mais n’est-ce pas finalement une rayure découpée ?…

Cela fait des années que j’admire dans les magazines ces quilts modernes aux rayures omniprésentes. J’aime cette singularité : à partir de tissus si banals mais assemblés, recoupés, triturés, Gabrielle nous offre des tableaux qu’on n’oublie pas. Moi qui préfère habituellement les quilts inspirés de la tradition plutôt que l’art textile moderne, je suis happée par la force évocatrice de ses ouvrages.

L’Oeil du Cyclone (80 x 83 cm).

Autre particularité, ses quilts d’art textile sont cousus et quiltés « dans les règles de l’art », on perçoit rarement le quilting sur les photos mais il est dense et accentue le mouvement du sujet. Certaines pièces sont appliquées à la machine avec un point zig-zag parfaitement intégré au dessin ; la technique est toujours à la hauteur de la composition.

Papillon Bleu (120 x 150 cm)

Je vous laisse découvrir d’autres oeuvres dans la galerie de son site. Quels sont mes préférés ? Graffitti reste pour moi un des plus impressionnants. J’aime énormément les papillons, les ibis, ces répétitions que je n’apprécie pas trop en peinture sont ici pleinement justifiés par la tradition du bloc en patchwork. Je trouve l’Oeil du Cyclone très envoûtant… Et l’Aphrodite est une réussite totale…

Ce style si personnel a rendu Gabrielle Paquin connue dans le monde de l’art contemporain international. Elle a été plusieurs fois retenue dans des expositions ou publications internationales, souvent la seule Française de ce niveau, comme par exemple dans le livre 500 ART QUILTS (ed. Lark Books)  où figure le quilt Scarlet Ibis, le quilt peut-être le plus abouti (sélection des 500 quilts d’art contemporain de 2010)… Et on le retrouve, unique témoin de la création française actuelle, dans le nouveau livre QUILTS around the World, from Alabama to Zimbabwe  (Voyageur Press inc.).

… Et malgré tout ce succès et ce style affirmé, Gabrielle consacre toujours beaucoup de temps au patchwork le plus traditionnel, celui-là même qui est exposé à Brouage ! Elle y a déjà exposé 4 fois, gage de la qualité de son travail. C’est d’ailleurs son amour pour les grands quilts des 18 et 19e siècles qui la mena vers le patchwork ; pour avoir la collection dont elle rêvait, elle s’y est mise avec détermination ! Elle en a terminé 16 depuis 1991, bien moins connus ou exposés que les modernes. C’est un peu un de ses jardins secrets, comme la peinture qu’elle pratique également…

Détail des « Doubles Etoiles plumetées Country », quilt exposé à Brouage en 2011. Vous pouvez voir une photo du quilt entier dans un article précédent.

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* Brillant essai de Michel Pastoureau, l’Etoffe du Diable, sur la perception des tissus rayés dans le monde occidental. Au fil de la lecture, je suis passée du doute à l’enthousiasme, tellement cet écrit est documenté, original, incroyable… mais vrai ! Ma culture sur les rayures se cantonnait au tricot des marins bretons… ICI, vous avez un article partiellement inspiré d’un autre livre de M.Pastoureau, Bleu, histoire d’une couleur.

**  Plaids & Stripes, the Use of Directional Fabric in Quilts, de Roberta Horton , C&T Publishing

Supergoof est de retour dans Blogland

Rappelez-vous ma tristesse quand ma quilteuse néerlandaise préférée avait arrêté son blog… Elle a déménagé, trouvé une maison plus grande et a déjà accroché de si jolis quilts dans sa cuisine… Et puis son ordinateur est branché depuis ce matin ! L’envie et le temps de communiquer sont revenus ; je ne manquerai donc pas de lui rendre souvent visite.

Tant d’atmosphère avec si peu de couleurs, c’est la magie de Supergoof.

Quilts en liberté

Un livre de patchwork vient de sortir en français :

 Ce n’est pas une quilteuse chevronnée, mais une styliste touche-à-tout britannique très talentueuse qui a concocté ce bouquin. On a grand plaisir à le feuilleter ; tout d’abord, la couverture cartonnée est très agréable au toucher. A l’intérieur c’est un festival de couleurs, car cette dame a utilisé de beaux tissus aux riches imprimés, dont certains de Kaffe Fassett, avec qui elle a plus d’un point commun. Elle est également inspirée par les univers de Tricia Guild, Anna-Maria Horner, Amy Butler, Denyse Schmidt, qui toutes manient les couleurs avec brio et modernité.

Avec elle, chaque quilt a son histoire, son ambiance. Elle explique l’importance du choix des tissus qui conditionnera le style, l’allure du quilt. Les explications sont rationnelles, sans superflu, rassurantes.

Même si je trouve que ce livre est plutôt destiné aux quilteuses intermittentes car les modèles sont tous simplissimes, il vous séduira sans doute par la fraicheur et la féminité qui s’en dégagent.

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Pour mieux connaître l’auteur et ses multiples facettes, vous pouvez rendre visite à son site : www.yarnstorm.blogs.com . Tricot, crochet, cuisine, jardinage, photo… Que de tentations !

Pourquoi pas VOUS à Brouage ?…

Vendredi dernier, lors de ma visite à Brouage, j’ai eu la chance de discuter avec Dominique Husson dont je lis les articles avec avidité depuis tant d’années dans les Nouvelles du Patchwork. Il me semble que c’est elle qui a « inventé » l’exposition de Brouage, elle en est en tout cas une pièce maîtresse depuis le début et en symbolise à la fois la beauté et la rigueur. Elle m’a permis d’en saisir un peu plus l’esprit, les limites, les attentes…

A Brouage, il n’y a que de magnifiques quilts, c’est une évidence. La volonté des organisatrices est d’exposer les plus belles copies des quilts américains des XIXe – début XXe siècles, ainsi qu’éventuellement des quilts inspirés de cette époque. Je crois que, la première année, les quilts étaient tous entièrement assemblés à la main, alors qu’à présent seul le matelassage l’est encore obligatoirement. Cette année, même une bordure en appliqué-machine est présente ; a-t-elle échappé à la vigilance du jury ? Le quilt est magnifique, c’est juste un peu malicieusement que je pointe cette évolution, d’autant plus que le centre comportait aussi du tissu batik pas très d’époque !

Très jolie bordure appliquée… à cru, point de feston à la machine

Si vous souhaitez participer à cette exposition de prestige, vous avez donc bien compris que votre ouvrage devra évoquer l’esprit « quilt américain d’il y a 100 à 150 ans », l’Age d’Or des quilts classiques, il sera donc cousu de préférence avec des tissus « repro » qu’on peut à présent acheter facilement… Quoi d’autre ? Un conseil de D.Husson : ne pensez pas à la dimension du lit de votre petite nièce, pensez à… Brouage. En clair, pas de long rectangle disgracieux de la taille d’un couvre-lit une place, privilégiez les grands… jusqu’à immenses carrés, ou bien des rectangles élégants ! Le minimum est 1,50m de côté. Là encore, il faut accorder le droit au jury d’accepter un quilt extrêmement travaillé de 1,47m… et d’en refuser un autre d’ 1,50m pile. Les plus petits seront le plus souvent disposés sur des tables centrales, on les voit bien mais ils sont plus difficiles à bien photographier.

Quilt à dominante marron-bleue que j’aime beaucoup, quelle que soit la technique utilisée pour sa bordure ! Oeuvre de Liesbeth Spaans-Prins, « La Mangerie au chemin de roses et de ronces » (sous réserve)

Les modèles

A force de copier les plus beaux quilts des musées américains, Brouage risque de manquer de renouveau, car ceux qui n’ont pas encore été copiés -même avec l’abondance des propositions- ne le furent pas car ils manquaient peut-être de charme auprès des quilteuses actuelles. Il faut pourtant offrir au public de nouvelles oeuvres ! Donc les créatrices ont toute leur place. Ici la réflexion de mon fils de 13 ans devant les quilts copiés d’originaux : « A quoi ça sert de faire pareil ? Quand on copie, on n’avance pas ! »

 On peut aussi rechercher les techniques longtemps oubliées, comme les « Tile Quilts » que je considère comme une mine d’or. Les Abeilles, tenez-vous prêtes pour un stage sur cette technique à l’automne !

Les couleurs

Chacune d’entre nous a des combinaisons de couleurs préférées. Les couleurs très dominantes de Brouage sont rouge-beige-brun, très flatteuses dans un intérieur et sur les murs en pierre des salles d’expo. Mais les livres sur les quilts historiques insistent sur le manque de tenue dans le temps de certaines couleurs, c’est pourquoi les teintes nous apparaissent bien plus neutres que ne l’avaient choisies les quilteuses d’alors, ou bien fort différentes ! Par exemple, la couleur verte n’était obtenue, avant 1875, qu’en teignant successivement le tissu en jaune puis bleu indigo (ou l’inverse). Souvent le jaune partait et le vert devenait de plus en plus bleu ! Puis vint la teinture chimique en une seule opération… et malheureusement elle était très sensible à la lumière… Si vous voyez un quilt avec des tiges beige marronnasse, c’est que ce quilt date probablement juste d’après 1875 ! Les beige sont parfois des verts qu’on ignore… En revanche, les rouges et les bleus ont bien tenu dans le temps, notamment grâce à la garance et l’indigo. Osez donc les couleurs vives si vous les aimez , les quilteuses américaines les aiment en tout cas !

Dominique Husson est consciente de la maturité du concept « Brouage » et recherche des pistes pour en garder la vigueur. Pourquoi ne pas rebondir sur les quilts bicolores rouge/blanc comme à New-York ? Je lui ai  suggéré de le coupler avec des bicolores indigo/blanc, je l’ai sentie réticente mais malgré tout attentive. Elle souhaite aussi que soient plus souvent utilisées les harmonies anciennes mais peu exploitées à Brouage, parfois si appétissantes, comme framboise-pistache-chocolat ! Mais la nouvelle couleur qui lui tient à coeur est le « poison green », ce vert-jaune souvent couleur « renégate », utilisée à petite dose pour mettre encore plus en valeur les autres couleurs. Non, cette couleur n’est pas dangereuse, « juste » sur les anciennes tapisseries en papier peint pour lesquelles le produit utilisé pour teindre en vert était… l’arsenic, d’où son nom !

Quelques verts poison, dont le fil Aurifil mako 50 n° 5016, plus poétiquement baptisé « Péridot », une pierre semi-précieuse de ce vert-jaune particulier

Le matelassage d’un quilt destiné à Brouage

A vous donc de trouver -ou de créer- une maquette dans l’esprit de la fin du XIXe siècle, de la dimensionner généreusement, de créer une gamme de couleurs si possible un peu innovante mais restant dans « l’esprit tradi »… Et il faut surtout avoir de la passion pour votre ouvrage car vous allez vivre des centaines d’heures avec lui ! Il vous faut aussi une bonne pratique du matelassage main, des tendons prêts à l’épreuve du quilting intensif… Je me souviendrai toujours de mon sentiment de culpabilité après avoir incité notre abeille Maïté à terminer le quilting de son Arbre de Vie pour une exposition mineure… ce qui s’est soldé par une inflammation durable des tendons du poignet. Attention à toutes, prévoyez une grande marge de temps pour le matelassage. C’est finalement sa qualité, sa densité qui conditionneront la sélection finale de votre ouvrage.

Avis aux Abeilles

Nous allons donc nous joindre à la rentrée à l’Association de patchwork existant déjà à Colomiers. Parmi nous toutes réunies, il y en a quelques unes capables, à la fois par leurs capacités et leurs disponibilités, de présenter un ouvrage à Brouage. Pour celles qui le souhaitent : je me ferai un plaisir de vous aider à trouver votre modèle, à créer votre maquette, à choisir vos tissus… Réfléchissez si vous voulez vous lancer dans cette aventure, nous en reparlerons en septembre ! N’oubliez pas : je peux volontiers vous donner un coup de pouce, mais ce sera surtout un long chemin solitaire semé de difficultés, de doutes… mais quelle récompense au final !

Virtuoses de l’Aiguille

J’ai eu la chance de passer une journée magnifique du côté de Marennes, non pas pour manger des huîtres (on n’est plus dans les mois en R) mais profiter quelques heures de la magnifique plage sauvage de l’île d’Oléron… et bien sûr visiter la célèbre exposition de patchwork traditionnel à Brouage. C’est le rendez-vous de la perfection de notre art, avec un focus sur la copie d’oeuvres américaines du XIXe siècle visibles dans des musées.

J’aimerais pouvoir féliciter personnellement chacune des quilteuses exposantes, chaque ouvrage ayant bénéficié de tant d’efforts et de talent ! Certaines sont des habituées de Brouage, elles travaillent sans relâche pour exposer tous les deux ans. Nous apprenons dans les Nouvelles du Patchwork n°109 que malheureusement deux d’entre elles nous ont quittées, Josiane Bréhin et Marie-Paule Nedelec. Elles laissent derrière elles tant de belles courtepointes qu’elles restent ainsi encore dans notre monde. S’il faut donner mon coup de coeur, ce sera « Bleu-gris, ciel de Bretagne » de Josiane Brehin, dont les explications sont offertes dans le n° 107 des Nouvelles.

Quilt très scrappy, au titre qui me parle… « Bleu-gris, ciel de Bretagne » de Josiane Brehin

Cette année, les triangles sont à l’honneur ! Il y a bien sûr un grand éventail de modèles, mais moins d’étoiles, moins de carrés… plus d’hexagones, de triangles, et toujours des « médaillons », chers à Dominique Husson la fondatrice des expos à Brouage.

Pour ne pas me disperser dans mes commentaires, je souhaite plutôt me concentrer sur trois exposantes.

Aline Joulin est une quilteuse prolifique, bien en adéquation avec Brouage : elle adore les quilts traditionnels de très grand format, matelasse magnifiquement et très densément… comme toutes les autres de Brouage serais-je tentée d’ajouter, mais ce qui la distingue pour moi, c’est le choix de ses modèles et sa palette de couleurs, si proches de ce que je ferais si je m’y mettais ! J’aime avoir des maquettes simples et un look scrappy !

Détail de « Potomak » d’Aline Joulin, avec des tissus repro couplés d’étoiles blanches qui éclairent si bien l’ensemble

Aline est actuellement déléguée france-Patchwork des Charentes-Maritimes (où se trouve Brouage), nul doute qu’elle doit savoir motiver les quilteuses de la région !

France Aubert expose cette année pour la première fois à Brouage mais c’est une entrée remarquée ! Je crois ne pas me tromper en écrivant qu’elle est profondément amoureuse des quilts anciens des Etats-Unis, son remarquable parcours et son blog en témoignent. Son style est souvent marqué par l’influence country avec une judicieuse utilisation de tissus dits humbles, souvent à carreaux ou petits motifs, qu’elle sait si bien assortir aux fleurs et tissus plus complexes. Sa palette est souvent tendrement passée mais jamais trop douce. J’aime aussi la liberté qu’elle s’octroie en osant changer complètement la gamme de couleurs d’un modèle ancien (comme pour 1692 rue de l’Observatoire) ou sa capacité à inventer des modèles (Les Maisons Roses).

Petit détail des Maisons Roses, entièrement assemblé et quilté main

Je dois dire que je connaissais ces quilts en photo, mais quel choc de les voir « en vrai » ! Les couleurs éclatent dans l’Observatoire, rendant ces étoiles très présentes, et le quilting est absolument superbe. Quant aux Maisons Roses, elles sont si douillettement placées dans leur jardin !

Mon troisième coup de foudre est pour Gabrielle Paquin. D’abord, elle maintient son goût pour les quilts bleus traditionnels, contre vents et marées ! Cette couleur si aimée et utilisée au XIXe siècle dans les quilts n’est que rarement représentée dans les expos rétrospectives. Pourquoi ? Le rendu est-il trop frais et « moderne » ?… Gageons que dans les années qui viennent les indigos/blancs vont refaire surface, après le succès historique de l’expo rouge/blanc de New-York ! Gabrielle a su imposer, au fil des ans, une étoile mennonite à Brouage, puis un pur bicolore bleu/blanc (la Roue du Charpentier), et cette année on a eu une époustouflante création bleu/blanc/marine d’esprit country du fait des tissus à carreaux utilisés, mais si sophistiqué par la maquette… Bravo Gabrielle !

Double étoile plumetée, de Gabrielle Paquin, 220 x 220 cm

Gabrielle n’est pourtant pas très connue pour ses quilts traditionnels, mais a une renommée internationale en tant qu’artiste textile, bientôt je vous en parlerai !

Prochain article : « Pourquoi pas vous à Brouage ? »… Les conditions officielles… et mes petites réflexions pour une « encore plus belle expo » grâce à vous en 2013 !

Supergoof, c’est fini…

Ma quilteuse hollandaise préférée a décidé de fermer son blog, cela me rend toute tristounette car elle a compté dans le choix de mes ouvrages, m’a personnellement encouragée à entreprendre le Sampler de Sylvia, m’a donné l’idée via son blog de faire un « quilt aux dés » que vous verrez « bientôt » quilté… Son style et son humour ont tellement plu dans la blogosphère qu’elle a peu à peu été envahie par des centaines de messages du monde entier, des demandes pressantes de modèles, photocopies, explications… et même quelques remarques acerbes sur sa lenteur à répondre… Bref elle prend le large, je lui souhaite de tout coeur bon vent et belle vie dans la tranquillité retrouvée ! Voici la photo qu’elle nous offre pour signaler son changement de maison et de vie :

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Vous pouvez toujours vous promener dans son blog y découvrir les merveilleux quilts, toujours cousus tout à la main. Sa palette de couleurs, fraiche et claire, vous séduira j’en suis sûre.

Passion Patchwork, Passion Samplers

France Aubert, la passion du patchwork

C’est en automne dernier que j’ai retrouvé France Aubert par le biais de son blog Passion Patchwork, le bien-nommé ! J’y découvre une mine d’ouvrages, des sacs, des pochettes, des tableaux en point de croix, etc. mais surtout de superbes quilts !

Un Jardin de Grand-Mère fort harmonieux

Que de beaux ouvrages ! France s’inspire du folk art américain, du meilleur, qu’elle déniche chez Blackbird Designs, Janet Miller par exemple, mais se ressource principalement auprès des quilts de tradition. Par exemple, les maisons, grandes et petites, sont un de ses thèmes de prédilection, ainsi que les étoiles de toutes sortes, les paniers, les tulipes, bref tout le petit univers des blocs aux infinies variantes qui constituent le plus beau du patchwork traditionnel.

Maisons d’Automne de FranceA, de nombreux tissus à carreaux ou rayures renforcent la chaleur de ce modèle. A noter l’union assez rare des bleus et des marrons que nous affectionnons toutes deux !

LA Quilteuse de Samplers !

Mais son genre préféré semble être, au fil du temps, la création de samplers. Elle les collectionne avec bonheur, recherche de belles harmonies, des thèmes de saison, toujours avec son style « Country chic » très minutieusement cousu. Regardez cet immense ouvrage :

Grand Sampler aux détails magnifiques et plusieurs blocs créés par FranceA, avec un montage selon la méthode « quilt-as-you-go », c’est-à-dire que chaque bloc est quilté séparément puis assemblé.

Dans d’autres couleurs, j’aime beaucoup celui-ci aussi, à une échelle fort différente :

Mini-quilt bleu-blanc-rouge-marron, un bel assortiment de tissus de reproduction et un adroit mélange de carreaux et de fleurs pour un air country frais et craquant

Actuellement, elle continue à coudre son Dear Jane, sampler historique dont je vous reparlerai, et participe, semaine après semaine, à l’aventure du sampler Civil War initié par Barbara Brackman, historienne du patchwork américain -un thème que j’aborderai aussi plus tard ! France a choisi pour cet ouvrage une gamme très douce de tissus réédités du XIXe siècle et c’est aussi pour elle l’occasion de relire des livres ayant trait à cette période, approfondir ses connaissances et généreusement nous faire partager ses découvertes.

France a tant d’exprience dans son domaine qu’elle crée des modèles, parfois des kits, vous avez sûrement déjà admiré l’un d’eux dans les magazines ! Ses explications sont toujours soignées, vous pouvez lui faire confiance, et vous pourrez vous adonner à la quiétude de l’assemblage à la main et suivre ses conseils avisés pour des finitions irréprochables.

Gage de qualité reconnue, FranceA expose cette année (enfin !) à Brouage, deux quilts d’un coup ! Ce ne sera sans doute pas la dernière fois… En attendant, allez musarder chez elle…

Une création de France A.

HAPPY QUILTING !

http://passionpatchwork.wordpress.com/

Passion Samplers

A la découverte de France Aubert

Alors que je commençais tout juste à être « prof de patchwork », en décembre 2005, j’ai acheté par réflexe un hors-série des Editions de Saxe : Passion du Patchwork – Quilts traditionnels. Une fois à la maison, j’ai trouvé les modèles bien craquants, de très bonne qualité, sans enfantillages, bref d’un goût exquis. Moi qui aime tant les Etats-Unis, je suis tout de même parfois perplexe devant des modèles trop maniérés ou trop enfantins. Il y a une frontière invisible entre le style « Folk Art », « Country », qu’on peut traduire par « Art populaire » et « style campagnard » que j’apprécie énormément, et la valorisation de n’importe quoi. Dans ce domaine se côtoient le meilleur  et du moins bon, mais c’est à chacun d’établir sa propre frontière évidemment !

Donc ce hors-série tout de suite m’impressionne par sa qualité, son raffinement, avec ses mélanges de fleurs et de carreaux fort réussis, la clarté des explications, la présentation d’étiquettes-signatures soignées, bref un beau florilège de modèles. Ce n’est qu’après plusieurs jours que je me rends compte qu’une seule personne a élaboré ces 12 ouvrages, France Aubert, une Française ; entre autres trois samplers étaient présentés, l’un d’eux présentant une rare particularité : les blocs sont ronds… comme des boutons !

Sampler et Boutons de France Aubert, 2005

Un sampler tout classique est ainsi transformé en sampler à thème ! J’ai montré maintes fois cet ouvrage en exemple, afin d’inciter mes Abeilles à personnaliser leur « Sampler de Débutante ». Et c’est un fait qu’aucun ne ressemble à celui de la copine, beaucoup sont de style « country » avec parfois des points de croix, d’autres en batik ou en tissus japonais… Tous ont la marque de fabrique de la quilteuse, c’est là l’essentiel !

Qu’ai-je retiré de ce premier contact indirect avec FranceA ? Tout d’abord du plaisir, de la motivation, mais aussi une idée de stage ! Son quilt d’étoiles plumetées m’a incitée à proposer ce thème.

J’ai suivi son patron, mais je n’ai pas son talent et sa minutie pour tout coudre à la main, c’est pourquoi j’ai proposé ma propre version d’explications, tout à la machine, avec les « petites plumes » en couture sur papier pour assurer la précision. Ce n’est pas un bloc facile, et pourtant à la suite de ce stage ont fleuri de multiples étoiles plumetées tout autour de moi : rien ne pouvait me faire plus plaisir ! A mon tour de pouvoir remercier France qui m’a inspirée…

NB  : toutes les illustrations proviennent du blog de France, « Passion Patchwork » (voir ci-contre). Bientôt, la suite de ma découverte du style de France !

Et je n’oublie pas le mot de la fin que j’emprunte à France :  HAPPY QUILTING !

La Créatrice de Lumière

Vous les Abeilles, vous m’avez entendu maintes fois dire en cours qu’un quilt réussi le doit souvent au respect des valeurs, encore plus que des couleurs. Je veux dire que le choix des tissus compte à plusieurs titres – les styles d’imprimés avec leurs ambiances, les couleurs, l’intensité – mais les valeurs sont parfois oubliées. C’est pourtant une notion simple : imaginez le bloc en noir et blanc, est-ce que le motif est autant visible que vous le souhaitez ? Si c’est oui, le bloc « fonctionnera » même vu de loin !

« Etoiles immobiles » de MC Tsuruya, aux si subtils effets de lumière

Celle qui réussit prodigieusement à manier les valeurs, c’est mon amie Marie Claude. Certains de ses quilts ont une lumière prodigieuse comme une peinture de la Renaissance avec l’utilisation du clair-obscur.

Fichier:La Tour Le Tricheur Louvre RF1972-8.jpg

Ce tableau de Georges de La Tour (héritier de Caravage, de l’époque de la Renaissance) sur fond noir par exemple, avec ses ombres marquées, met d’autant plus en valeur la blancheur de la peau, le chatoiement des étoffes…

Ne trouvez-vous pas une certaine correspondance ? Ce quilt très symbolique est le nouveau-né de Marie Claude, allez lire son histoire sur son blog*.

Marie Claude sait partager son savoir et ses sentiments. Quand elle écrit un article sur un de ses quilts, vous entrez dans l’intimité de ses sources, ses techniques, ses inspiratons, ses difficultés, ses heureux hasards… De plus, elle répondra toujours à vos messages avec l’infinie patience et la gentillesse qui la caractérisent.

Ici un exemple de quilt de style américain faits de « scraps » (restes de tissus), « Les vieilles Ecoles ». Judicieuse alternance des blancs et noirs dans les maisons !

Lorsque j’ai regardé pour la première fois les dizaines de quilts sur son site**, j’avais l’impression qu’il y avait deux artistes, une Occidentale et une Japonaise. L’Occidentale ayant fait des quilts ambitieux dont j’avais souvent gardé les modèles mais que je n’avais jamais réalisés… et la Japonaise qui s’approchait de mon absolue esthétique déjà tant admirée chez Shizuko Kuroha.

L’Occidentale utilisait comme moi dans les années 80 les tissus qui lui tombaient sous la main -les robes, chemisiers et autres vêtements en coton, des coupons de chez Bouchara et des grands magasins, mais encore très peu de tissus de patchwork- pour en faire des quilts enthousiasmants et pleins de souvenirs.

L’Etoile de l’Amitié avec toutes sortes de tissus, y compris des hermines bretonnes !

La Japonaise avait mystérieusement accès à ces tissus rêvés, des gammes d’indigos incroyables, des tissus de kimonos, des soies chatoyantes, des rayures et ikats somptueux, et en faisait des quilts remarquablement équilibrés, lumineux, uniques.

« T comme Tsuruya »,  bloc traditionnel américain avec des tissus japonais, cousu et quilté main. Ce bloc en T majuscule devient autant de petits kimonos !

Les deux artistes ne font évidemment qu’une, c’est Marie Claude avec sa connaissance approfondie de l’Art grâce à une vie passée à visiter les musées, sa passion des livres… et les tissus d’une part,  et d’autre part, son mariage avec Osamu et l’adoption de la culture de son pays d’origine, le Japon.

Détail d’un de mes quilts préférés, « Cubes flottants » 

Je pourrais encore vous parler longtemps de mon admiration et mon amitié pour Marie, mais sa modestie en souffrirait. Sachez encore tout de même que sa famille est son plus grand trésor, ses enfants ont su trouver leur place avec leur bi-culture. Tous restent inquiets du sort des Japonais à la suite du drame du 11 mars dernier. Ici on n’en parle déjà plus, pendant ce temps les Japonais déblayent encore et toujours, avec la ferme volonté de retrouver un jour leur vie « d’avant »…

« Chant d’Etoiles » en soie, dont les cravates de son mari

Ses quilts mériteraient une belle exposition, à Ste-Marie-aux-Mines par exemple. Quelle chance ce serait pour nous Quilteuses que la Créatrice de Lumière nous laisse entrer dans sa Chambre des Couleurs !…

* Son blog vous parle de ses quilts, mais aussi des expos que Marie visite, ses découvertes au fil des promenades et voyages, ses talents culinaires… http://chambredescouleurs.france-i.com/

** Son site existe depuis longtemps déjà, vous avez accès aux photos de ses quilts depuis ses débuts, ainsi qu’à ses précieuses collections : http://www.france-i.com/marie/