Bientôt Noël…

Bienheureux symbole de l’hospitalité, la couronne en log cabin proposée en novembre sur ce blog a été interprétée par plusieurs lectrices ; voici celle qui clôture cette série, celle de Marie-Claude du blog « La Chambre des Couleurs », agrandie pour en faire une sur-nappe pour une table ronde. Elle est faite de multiples petits bouts de tissus de Noël accumulés au fil des années, qui trouvent ici leur meilleur emploi !

Allez voir ici d’autres photos de cette couronne ! Puis, ne manquez pas d’admirer son nouveau quilt, « Jardin Persan ». Si vous manquiez de motivation pour commencer un nouvel ouvrage, celui-ci donne l’irrésistible envie de farfouiller dans ses tissus et commencer un scrap-quilt !

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Enfants joyeux, un peu surexcités, foyer étincelant de couleurs et de lumières, table généreuse, cadeaux partagés, Noël est la fête familiale par excellence. Je vous la souhaite, à toutes, pleine de bonheur.

 Etoile de Bethléem (ou Lone Star) cousue avec des tissus de la collection de Noël Makower 2009 avec un fond en métis couleur ficelle. Entièrement cousu et quilté à la machine.

Et pour vous souhaiter un très joyeux Noël, je fais appel à ce Santa Claus américain qui a tout compris : il porte une belle capeline quiltée !

JOYEUX NOËL ! MERRY CHRISTMAS ! FELIZ NAVIDAD ! FROHE WEIHNACHTEN ! BUON NATALE ! FELIZ NATAL ! VROLIJK KERSTFEEST ! GOD JUL ! … et en breton : NEDELEG LAOUEN !

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Une Reine du Crazy victorien

Dans notre jolie banlieue toulousaine expose ces jours-ci Denyse Saint-Arroman qui découvrit le patchwork aux Etats-Unis en 1977, passion qui ne l’a depuis jamais quittée… Elle est l’auteur de 7 livres que vous pouvez retrouver sur son tout récent  Blog de Patchwork, Perles et Broderies. Je l’ai rarement croisée mais la connais de réputation, elle encadre une poignée de quilteuses toujours poussées à se dépasser pour arriver à des oeuvres uniques, souvent très embellies et chargées de perles et broderies.

A vrai dire, nous nous côtoyons dans notre région toulousaine mais nous n’avons pas les mêmes univers. Je m’émerveille toujours de la diversité des expressions à partir des mêmes ingrédients ! Son exposition m’a confortée dans l’idée que j’avais d’elle, c’est une reine des crazy quilts, les siens sont parmi les plus beaux que j’aie pu approcher.

Crazy avec le point de chausson en fil jaune que Denyse Saint-Arroman affectionne depuis des années, avec en détail vue sur les points agrémentés de perles de rocaille et les broderies extrêmement fines.

Ici, la richesse des tissus suffit, avec le point de chausson simple, à faire une oeuvre lumineuse et saisissante. 

Enfin celui-ci, encore plus dense, est fascinant par la modernité de la maquette, la maîtrise des valeurs, la richesse des tissus…

Il y a beaucoup d’autres ouvrages présentés, mais ces trois-ci valent à eux seuls le déplacement ! Vous avez jusqu’au 17 décembre 2011 pour aller admirer l’expositions de Denyse Saint-Arroman, au Centre Culturel Altigone à St-Orens-de-Gameville en Haute-Garonne (ouvert tous les après-midis à partir de 14H).

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Tradition chérie, expression libérée

Que de styles différents au sein de notre communauté de quilteuses ! Il suffit de naviguer un peu de blog en blog pour en mesurer la diversité : quelle chance nous avons ! N’oublions pas de nous déplacer voir les expositions, discuter, échanger… Cela nous enrichit infiniment.

Certaines s’épanouissent dans un seul style, ce qui leur permet de devenir expertes dans leur domaine, d’autres, dont je fais partie, sont passionnées par toute l’histoire des quilts et des femmes qui les ont créés. C’est ainsi que je m’intéresse particulièrement aux quilteuses qui ont allègrement balancé aux orties les règles de base du patchwork traditionnel comme la concordance des coutures, les angles bien respectés… Mais surprise, ces femmes ayant lancé le populaire mouvement du Liberated Quiltmaking ont de solides bases classiques, un amour de la tradition et une fine connaissance de divers mouvements artistiques.

Liberated Log Cabin Medaillon, de Gwen Marston (2009). Admirez les couleurs et le minutieux quilting à la main, témoins de son attirance infinie pour les quilts Amish.

Ainsi la première, Gwen Marston, s’est d’abord investie dans les quilts anciens mais remarqua vite que ses préférés étaient ceux de tendance populaire, souvent très scrappy, qui accrochaient le regard avec leurs « défauts » de construction, leurs couleurs réparties bizarrement,  bref l’audace d’oser se moquer des règles établies. C’étaient souvent des contraintes qui menaient à ces audaces, comme un manque de tissu ou la redécoupe d’un quilt dans un précédent partiellement usagé, non une attitude artistique volontaire. Mais quel charme dans ces ouvrages ! De plus, la redécouverte et la valorisation des quilts Amish dans les années 1980 mit à jour non seulement les plus académiques, mais aussi beaucoup de quilts follement modernes. Enfin, la plus récente influence vient des quilts de la mouvance des Gee’s Bend, quilts réalisés par les plus pauvres Afro-Américaines d’Alabama, avec les restes de nos vêtements modernes (aussi bien des chemises en polyester que des jeans). L’inventivité de ces femmes actuelles, avec simplement ce qu’elles ont de disponible, éclaire sur la longue histoire cachée des quilts « spontanés » tout au long des siècles derniers, en particulier dans les campagnes. On constate que, d’une façon générale, les personnes oppressées survivent grâce à leur inventivité, et moins dramatiquement que le manque engendre la créativité ; c’est ce qui a eu lieu, aussi bien chez les femmes blanches avançant vers l’Ouest américain que chez les femmes noires, d’abord esclaves puis en situation à peine plus enviable pour la plupart dans les états du Sud.

Quilts de la communauté des Gee’s Bend, Alabama, avec un souci d’économie et de beauté.

Ainsi, à côté des quilts traditionnels à la beauté intemporelle, j’aime aussi ces quilts touchants au style informel. Les plus nombreux sont les quilts de bandes, faciles à monter (parfois sur un tissu de base). C’est en ce moment très tendance mais nullement récent !

Voyez ici l’article de Tonya Ricucci à propos de cette étoile faite de petites bandes de récupération ! Celui-ci ne fait pas partie des quilts à bandes les plus « faciles »…

Et ici, une étoile Amish de la collection Brown, date probable vers 1920, belle parenté :

Dans le mouvement du « liberated quiltmaking » ou des « unruly quilters »*, les quilteuses ne font pas tout-à-fait n’importe quoi quand même, sinon elles n’auraient pas cet impact durable. Evidemment elles ne découdront pas une couture qui a « mangé » un angle, oseront ajouter une pièce au bout d’une bande trop courte, mais regardez objectivement leurs ouvrages : les plus réussis sont harmonieux malgré leur côté bancal, une vraie expression artistique s’en dégage. Et pour cause ! Quand on décide de faire un quilt sans règles (double sens aussi bien en anglais qu’en français, avec la liberté qu’on s’accorde et la possibilité de laisser nos instruments de mesure au placard) chaque avancée se fait après réflexion puisqu’il n’y a aucun plan à suivre. Il s’ensuit parfois du découragement quand rien ne marche, mais d’autres fois un drôle de sentiment d’exaltation et de vrai bonheur, une impression d’expression jubilatoire ! Je dois avouer par exemple que mon crumb quilt en cours me donne mille satisfactions, et tant pis si le résultat est bizarre, j’aurai passé grâce à lui des journées formidables !

* quilteuses sans règles

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Si cette orientation vous intéresse, voici deux artistes pour commencer vos recherches :

http://niftyquilts.blogspot.com/

http://lazygalquilting.blogspot.com/

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Des mots doux, des mots fous…

…des mots sur nos quilts !

Au dos des quilts, on peut généralement lire quelques renseignements sur l’ouvrage : le titre, l’année de création, le nom de la quilteuse et parfois plus, souvent écrits au feutre indélébile ou, mieux, brodés. Les plus belles que je connaisse sont celles de France Aubert et de Maïté, abeille de mon groupe : toutes deux brodent avec soin et composent toujours sur l’étiquette un gracieux rappel du thème du quilt.

Sur le devant des quilts, ce sont en général des lettres appliquées qu’on trouve, le plus souvent sur des Folk Country Quilts on peut lire des mots d’actualité saisonnière (Halloween, Christmas, Spring…), des mots d’espoir, d’idéal ou de souhaits (hope, love, peace, best wishes…), ou autres petites locutions évocatrices de confort et de joie (Home sweet Home…). Les Anglophones sont très fans de ces petites locutions, inscrites un peu partout dans les maisons « cosy ». Nous, Francophones, avons également un trésor de maximes et d’expressions mais elles sont, malheureusement de nos jours, considérées comme ringardes !

Et puis, dans l’excitation de la découverte du patchwork libéré avec Gwen Marston en l’an 2000, Tonya Ricucci inventa l’alphabet libéré. Imaginez des mots piécés (et non appliqués), dansant au beau milieu du quilt, ou en ribambelle sur la bordure… Si vous voulez en voir quelques uns, c’est ici : Word Play Quilts.

J’avais une petite idée, en voyant les photos, du principe de la technique, mais j’ai tout de même acheté LE livre de référence :

C’est une jubilation d’imaginer, sur mon futur Crumb Quilt, une bordure évoquant le thème que j’ai choisi !… Mais au-delà de la technique –fort simple– du piéçage des lettres, j’apprécie beaucoup la page d’introduction écrite par Gwen Marston. Ce sera l’occasion de vous parler un peu plus du mouvement du Liberated Quiltmaking… dans quelques jours !

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Autre alphabet piécé disponible sur le livre « Motifs de Patchwork », de Yoko Saito, édition Quiltmania (2006) : le look des lettres est assez similaire mais pas la technique. Dans ce livre-ci, les blocs sont dessinés précisément, alors que Tonya Ricucci donne un processus, une méthode, pas un modèle.

Crumb along with us !

Je suis certaine que vous ne manquez pas d’idées d’ouvrages en cette rentrée ! Moi non plus…

Mais que fait-on quand on coupe des tissus ? Des tas de petits restes de toutes formes qu’on appelle des « crumbs » en anglais, c’est-à-dire des miettes, vous savez ces petits bouts de rien du tout qu’on expédie d’un coup de main à la poubelle en fin de journée…

Ne jetez plus, recyclez ! C’est le maître mot de Bonnie Hunter de Quiltville, depuis des années. Un de ses dossiers, datant de 2005, est consacré aux miettes qu’elle a décidé d’exploiter. Plus récemment, son amie Jo m’émerveilla avec un « crumb quilt » fini en août dernier, et je ne fus pas la seule ! Devant l’avalanche de compliments du monde entier  elle décida de proposer une aventure dans le monde des « quilts de miettes ». Chaque mardi, nous aurons des idées de blocs de miettes décalés, des conseils, et dès maintenant nous avons ici les premiers préparatifs pour un amusement de dix semaines.

Voulez-vous voir d’un peu plus près ?

Si vous n’aimez pas du tout ce crazy moderne, je ne vous en tiendrai pas rigueur car il faut être un peu folle pour entreprendre un tel quilt sans queue ni tête, mais moi je suis sûre que cela va m’amuser, alors dès mardi, je vais suivre les conseils, trucs et astuces de Jo pour faire mes premiers pas… Le but est de bien s’approprier un ensemble de réflexes pour se lancer et Jo nous guidera donc pendant deux mois, de quoi arriver à la taille d’un petit quilt.

Qui se joint à notre douce folie ?

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http://www.joscountryjunction.com/  : le blog de Jo

http://quiltville.blogspot.com/ : le blog de Bonnie

Les lisières, inspiration sans frontière

Si vous avez la fibre de la récup’, vous gardez sans doute tous les petits morceaux de tissus restant après la découpe, peut-être classés par couleur, style, taille… Non, je n’ai pas de système infaillible à vous proposer… Mais gardez-vous les bords des tissus, ces lisières doublement tissées et donc plus épaisses, dont un côté est imprimé avec les références et le nuancier ? Combien de fois ai-je dit : « La lisière, on la jette, on ne peut vraiment rien en faire »… Mea culpa, je ne connaissais pas encore Karen Griska ! Cette dame a popularisé l’utilisation des lisières en tant que tissus à part entière, à la manière des String Quilts (quilts de bandes). Quand son livre est paru en 2008, l’idée me semblait farfelue et la couverture ne m’inspirait pas trop mais je l’ai quand même commandé « pour savoir », car je suis une insatiable curieuse dans le domaine du patchwork. Attention, dépêchez-vous de l’acheter si ce livre vous intéresse, il est bientôt épuisé !

On ne peut certainement pas dire qu’elle est la première à utiliser les lisières (voir l’article précédent !) mais c’est elle qui a donné l’impulsion décisive dans le monde entier pour faire éclore des centaines d’ouvrages à base de lisières. Mon préféré du livre est celui-ci :

Et voici quelques autres idées, toutes (je crois*) prises à partir du blog enthousiasmant de Karen Griska cliquez pour mieux les voir :

N’est-ce pas incroyablement artistique ?

Nadia Stumpf est une de celles à avoir fait un des plus beaux panneaux en lisières que je connaisse. Admirez les dégradés, la disposition, la retenue dans les tons choisis… Une vraie recherche personnelle. Je ne la connais que par son blog « Patchworkrama » et les modèles qu’elle crée, mais il est évident qu’elle est le top du top des profs de patchwork en France !

Quant à moi, bien plus modestement, j’ai demandé aux Abeilles de ne plus jeter les lisières -un bon début- et « un jour » nous ferons quelque chose avec ! J’en ai maintenant un carton plein, il faudrait vraiment qu’on s’y mette cette année…

Est-ce compliqué de travailler avec ces lisières ? A vrai dire, on peut dire que c’est plus facile qu’avec du tissu coupé, car vous avez un bord fini qui, jamais, ne s’effilochera. Le principe préconisé dans le livre est d’avoir un tissu de base en coton de la taille de la pièce et de coudre dessus, lisière après lisière, afin de couvrir complètement cette base. Variantes : on peut utiliser du non-tissé, du papier (à retirer ensuite) ou… rien du tout, avec juste une règle ou un gabarit pour contrôler la taille de la pièce. L’avantage de la lisière est qu’on n’a pas besoin de la mettre endroit contre endroit pour la coudre, il suffit de la coudre directement en place. La couture sera visible et participera à l’aspect singulier d’un quilt en lisières.

Exemple d’assemblage vite fait : à gauche, trois lisières assemblées à l’aide de deux coutures (fil blanc sur le bord de la lisière) ; à droite, lisières assemblées vues de dos, vous pouvez voir le fil de la cannette en rouge. Selon le modèle, on voudra laisser apparaître plus ou moins de tissu imprimé, il n’y a pas de règle stricte !

Il faut savoir que ce quilt sera plutôt lourd, prenez-le en compte quand vous choisirez votre modèle. En ce qui concerne le quilting, il dépendra comme d’habitude du modèle. En général, je vois plutôt des quiltings à la machine, regardez comme cela peut être joli :

Certaines cependant réussissent à quilter à la main  :

Ce que vous pouvez retenir, c’est que presque n’importe quel bloc peut être transformé par des lisières ! Pour finir de vous convaincre, voici mon unique petit ouvrage en lisières, une trousse de forme basique qui m’est fort utile et me rappelle quotidiennement que c’était très drôle de choisir et coudre ces petites bandes !

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*Je collecte depuis des années dans mon ordi des photos de quilts en lisières, la majorité des photos proviennent du blog de Karen Griska (à qui j’ai écrit pour signaler mon « pillage » bienveillant). Surtout n’hésitez pas à vous manifester si vous reconnaissez ici une de vos oeuvres. Le copyright est une affaire délicate quand on fait un blog à vocation informative et pédagogique comme celui-ci. A chaque fois j’en informe les intéressées… que je peux contacter, mais je sais que je risque de faire des impairs du point de vue de certaines quilteuses, je m’en excuse par avance.

D’autre part,  enrichissez cet article en signalant vos propres ouvrages en lisières ! La rubrique des commentaires est faite pour cela.

Merci de prendre le temps de me lire,

Katell, quilteuse forever

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Références :

Nadia Stumpf : http://patchworkrama.canalblog.com : son blog
http://patchworkrama2.canalblog.com : sa vitrine (vente de modèles, dates de stages)

Karen Griska : http://selvageblog.blogspot.com/ : son blog

A découvrir également l’initiative formidable de Karen, un musée et une galerie de quilts : nous pouvons toutes y participer ! http://onlinequiltmuseum.com/

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Inspiration – Création

Nous savons toutes que le patchwork est une activité extrêmement ancienne. Sans développer sur les peaux de bêtes assemblées durant la préhistoire, je ne peux résister à l’envie de vous montrer de troublantes momies de chats, celles-ci sont visibles au British Museum de Londres (à gauche) et au Louvre (à droite) :

Tressage de bandelettes de lin dont le motif nous rappelle quelque chose…

Restons donc modestes ! Si les historiennes datent le bloc du « Log Cabin » de la fin du XIXe siècle, c’est bien l’apparition de ce nom associé à ce modèle, et non son invention. Dans le cas de ces momies, le travail s’apparente plutôt à du meshwork ou tissage de bandes de tissus (au lieu de coutures).

Au tout début des années 2000, j’ai eu l’idée un jour (ou plutôt une nuit) de couper et coudre à la chaine des bandes de 4 cm, de toutes couleurs et tous styles, et de les agencer autour d’un gros carré central rouge fleuri ton sur ton de 12 cm, à la manière d’un bloc de log cabin, et de terminer ce carré par une bordure de 8 cm même tissu rouge . Multicolore à dominante chaude, ce premier grand log cabin avait le chatoiement des tapis d’Orient, j’étais très fière de mon invention ! Je l’ai montré, expliqué maintes fois autour de moi comment s’organiser, comment limiter la courbure que le carré a tendance à prendre, j’en ai fait 3 autres… Et entretemps ont fleuri dans plusieurs magazines des quilts très similaires ! J’étais plutôt fière d’avoir eu la même idée que des stylistes éditées… Et puis un jour, Quiltmania présente… une antiquité du XIXe siècle au modèle identique ! Quand je crois inventer une petite astuce ou un modèle, je me souviens toujours de l’histoire du grand log cabin. Combien de blocs ont-ils été inventés, oubliés, réinventés ?… On sait que souvent, petites et grandes découvertes ou inventions fleurissent en même temps dans le monde, d’où quelques querelles de paternité autour de brevets… Sans compter les cas d’espionnage ou de triche, ces coïncidences sont troublantes, et même étudiées en psychiatrie sous le terme de syncronicité !

A gauche, la magnifique antiquité de 1880 dans un hors-série Quiltmania. A droite, pour couvrir un fauteuil fatigué, mon 3e « grand log cabin », cousu avec des bandes plus larges (6 cm coupées) et une gamme restreinte de couleurs. Il fut fait à toute vitesse, quelques jours avant le déménagement de ma fille ; c’est celui que j’aime le moins, pas assez scrappy, bandes pas assez fines…. Le n° 1 est chez mon autre fille, le n° 2 (à dominante turquoise-marine-jaune) est chez mes parents en Bretagne. Le n° 4 ?  En couleurs plus claires, en attente de quilting…

La géométrie des blocs traditionnels n’empêche pas du tout l’expression de nos sentiments. Un des 2 premiers blocs que je fais connaître aux débutantes est, avec la feuille d’érable, la baratte. Au début je ne le trouvais pas forcément beau mais pratique d’un point de vue pédagogique, puis j’ai admiré au fil du temps le potentiel d’un bloc si simple. Si vous voulez être touchée par un quilt de barattes, allez rendre visite chez Marie Claude dans sa Chambre des Couleurs, elle y a exprimé toute sa colère en cousant le top, puis, le temps ayant passé, l’a quilté avec plus de douceur, tout en subtilité :

Vous pouvez voir ici l’histoire de ce quilt ainsi que beaucoup d’autres photos. Preuve, s’il fallait encore le démontrer, que l’on peut toujours faire des créations avec du traditionnel !

Amusez-vous donc, osez changer les modèles, les harmonies, écoutez votre coeur ! La satisfaction est immense.

Le traboutis de Pénélope

Quelques Pénélope ont un destin hors du commun, mais nulle autre que la femme d’Ulysse ne porte une histoire qui vogue dans tant de mémoires. Tandis que son mari est parti en voyage -20 ans tout de même, les détails dans l’Illiade et l’Odyssée !- la belle Pénélope doit repousser de nombreux prétendants au trône… et dans son lit. La fidèle épouse utilise donc un stratagème pour les faire patienter : elle annonce qu’elle se décidera lorsque le tissage d’une toile (le linceul de son beau-père) sera fini. L’Histoire a retenu une tapisserie, avancée le jour et défaite la nuit afin de ne jamais la terminer.

Pénélope et les prétendants par John William Waterhouse (1912)

Heureusement, une autre Pénélope avance bien ses ouvrages et les termine ! Elle a même innové dans le domaine des ouvrages piqués, bourrés, dont les techniques se confondent pour les non-initiés : boutis, trapunto, piqué de Marseille…

La première innovation de Pénélope Roger est d’avoir osé changer de matière première pour faire un boutis : au lieu de la fine baptiste qui semble bien fragile, elle va choisir pour ses ouvrages une satinette de coton très fine et serrée pour le dessus, alors que le tissu arrière est un sergé de laine lâche, difficile à trouver de nos jours, dont les qualités sont pourtant essentielles pour réussir l’ouvrage.

Tout d’abord, Pénélope dessine ses motifs, souvent inspirés de la nature ou des objets qui l’entourent  ; une fois le tracé dessiné sur le tissu de dessus, les deux tissus bâtis ensemble (sans molleton intermédiaire, c’est un boutis !) Pénélope, inlassablement, suivra les lignes au point de piqûre, ce point arrière, lent à coudre, ayant l’aspect du point machine dessus et formant un point de tige dessous. Regardez ses ouvrages de très près, vous serez étonnées par la régularité des points, c’est d’une perfection époustouflante !… Pour plus de solidité, Pénélope a élu un fil de coton bien épais (le NV 40 de DMC). Toujours le souci d’un travail parfait qui tiendra dans le temps…Vient ensuite le fastidieux remplissage de chaque espace, en écartant minutieusement les fils du sergé de laine à l’arrière pour y glisser de la bourre ou une mèche de coton. Et là, le miracle opère et le tissu prend vie. Devant un boutis, Frédéric Mistral écrivit :

« Cet ouvrage divin qui ressemble à un pré dont le givre broda de blanc les feuilles et les pousses ».

Beauté évidente de la blancheur immaculée… Mais Pénélope aime les couleurs depuis toujours. Elle trouve les boutis bien… blancs. Son autre innovation, qui saute aux yeux et rend son oeuvre unique, est de  donner des couleurs à son ouvrage avec des appliqués très finement cousus :

Parfois plat, d’autres fois bourré, l’appliqué ne fut jamais associé au boutis de cette manière ! C’est cet ensemble de nouveautés qu’elle a protégées sous le nom de « traboutis », contraction de trapunto et boutis.

Quel relief et quelle gaieté ! Je n’ai pas encore rencontré Colette Roger (c’est son vrai nom) mais je l’imagine si gentille et gaie, forcément !… Au cours de nos échanges de mails, elle a eu la gentillesse de me transmettre les photos qui suivent, dont celle-ci de chez elle, avec l’un de ses plus grands ouvrages qui nécessitent environ 2000 heures (!!!) de travail :

Ce chef d’oeuvre -n’ayons pas peur des mots- a notamment été exposé à Brouage en 2009, puis à Sainte-Marie-aux-Mines la même année. J’étais tellement abasourdie par ce travail que j’en avais oublié d’en faire des photos !

Autre style, ce bouquet de fleurs dont chaque pétale est rembourré individuellement, admirez les détails !

Voici le tout dernier, « Méli-Mélo », exposé ce printemps à Brouage, éblouissant ! Le travail central est impressionnant et l’effet de matelassage avec des boutons comme un canapé Chesterfield est une trouvaille. Il ne s’agit pas de boutons mais bien de ronds appliqués et bourrés. La jolie bordure ajoute de la couleur et de la gaieté à l’ensemble.

Pénélope Roger est très heureuse de transmettre son savoir en se déplaçant de club en club, car jusqu’à présent aucun livre n’existe pour expliquer cette technique ; celle-ci est abordée dans plusieurs articles des Nouvelles de France-Patchwork* mais pour un travail aussi perfectionniste, rien ne vaut la démonstration de visu et la transmission des « petits trucs »… Toutes les heureuses quilteuses ayant appris avec elle sont ravies de sa gentillesse, sa patience… et encore plus respectueuses de son travail !

J’espère bien pouvoir faire venir un jour Pénélope dans le club que je vais rejoindre à la rentrée… Si vous aussi souhaitez la faire venir chez vous, n’hésitez pas, écrivez-lui ici : coletteroger@wanadoo.fr . Elle sera heureuse de vous apprendre tout sur le traboutis…

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*France-Patchwork, association loi 1901, www.francepatchwork.com

Voyage autour du Monde

C’est le nom d’un très beau motif de patchwork, que les Amish préfèrent nommer « Sunshine & Shadow » (Lumière du soleil & Ombre), aux carrés de couleurs courant tout autour du centre, comme ici :

« Trip around the World », à la palette pastel typique datant des années 1920, avec un vol d’oie en bordure extérieure (photo d’un site de vente)

Il existe une méthode plus rapide que le fastidieux découpage de chaque carré à l’aide d’un gabarit : on peut préparer chaque quart assez rapidement en coupant chaque tissu en bandes, en les cousant, recoupant, décousant, redécoupant… bref toute une petite cuisine qu’on retrouve également dans d’autres d’ouvrages, comme les Bargello si à la mode dans les années 1990.

Mais Bonnie Hunter a bousculé cet agencement certes magnifique mais très sage, elle a inventé les « Scrappy Trips around the World » ! J’adore ce modèle qui multiplie les petits Voyages, mais pour qu’ils soient intéressants il faut en aligner  beaucoup… J’ai donc testé cette méthode en faisant un unique Voyage qui m’a menée là :

Seize pavés de 36 carrés, entourés de trois rangées de carrés bleus formant une bordure discrète. Méthode où l’on doit être attentive, mais l’effort reste bien raisonnable.

C’est un ouvrage fait rapidement pour tester la méthode plus que pour obtenir un quilt, mais cet ouvrage trouvera sa place chez une grande voyageuse  : belle correspondance entre la fille et le nom du quilt !

Et si je recommençais le même modèle, que changerais-je ? Je soignerais évidemment bien plus les harmonies de couleurs, celui-ci ayant été fait à l’aveuglette avec les tissus dont je voulais me débarrasser (à part ceux de la bordure bleue). Je mettrais sans doute plus de couleurs chaudes au centre au lieu de les avoir éparpillées.

Je pense d’ailleurs que le prochain ouvrage de ce genre sera plutôt un « Scrappy Bargello« , toujours selon Bonnie Hunter. L’interprétation que je préfère est celle de Bea d’Une Aiguille dans une Botte de Foin, de style amish et aux carrés plus petits encore (voir le 28/07/2010). Elle l’a fait quilter par Nat de Reuil, c’est un duo gagnant !

C’est un magnifique scrappy Bargello de Bea, allez visiter son blog, vous y verrez beaucoup d’autres merveilles !

Et pour en finir avec mes expériences scrappy de l’année dernière avec Bonnie Hunter, j’ai fait pour mon neveu des Scrappy Majestic Mountains, mais à l’époque je n’imaginais pas faire un blog et l’ai donc à peine photographié, la voilà séchant avant l’envoi en Normandie :

Rocky Mountains pour Marc, 10 ans, avec un joyeux mélange de tissus figuratifs (montagne, cailloux, arbres), des batiks et autres…

Je crois que j’ai fini ma période de scraps extrêmes, jamais je ne renoncerai aux scraps mais je préfère me recentrer vers des ouvrages moins multicolores dans les mois qui viennent. Mais… on ne sait jamais quelle mouche peut encore me piquer !

Le voici chez moi, juste avant de l’offrir à Gaëlle, la globe-trotteuse :

voyage-pour-gaelle1

Scrap quilts : ya d’ la joie dans la récup !

A chacune sa façon d’aborder le patchwork. Certaines sont heureuses de suivre un modèle à la lettre,  tout leur art étant de reproduire à l’identique, avec constance et précision, ce qui leur a plu. Pourquoi pas ? La seule limite étant de trouver exactement les mêmes tissus… Vous n’imaginez pas les difficultés des vendeuses-conseilllères, dans un magasin de tissus de patchwork, pour trouver tout un ensemble de tissus collant parfaitement avec un quilt photographié dans un magazine ! D’où finalement le succès des kits proposés par certaines stylistes, avec explications et tissus dans une pochette, ce qui correspond à une demande. Sans oublier celles qui n’ont pas de magasin près de chez elles ni accès à Internet… Mais oui, beaucoup de personnes sont encore concernées.

Si on accepte de lâcher la main, affirmer la personnalisation d’un modèle, c’est déjà un pas de fait. Beaucoup de quilteuses réussissent à interpréter un modèle en utilisant au moins une partie de leur Trésor,  je veux dire leur réserve de tissus accumulés au fil des années… Et quand l’utilisation des restes de toutes sortes devient une jubilation, une fièvre de l’inattendu, le trésor devient le creuset de la création. C’est si drôle de mélanger tous ses souvenirs d’étoffes !

Comme je reste très classique dans mon expression, je me cantonne aux formes traditionnelles du patchwork, il y a déjà tant à faire ! Une fois la géométrie choisie -ici le modèle des dés- je m’amuse ! J’aime beaucoup la simplicité des scrap-quilts avec un seul gabarit. Pour celui-ci, j’ai respecté en général la règle du clair et du foncé en alternance, mais parfois j’ai volontairement cassé l’harmonie. Je ne dirai pas comme d’anciennes quilteuses construisant un bloc avec une erreur appelé « bloc d’humilité », que c’est « parce que seul Dieu est parfait », chez moi c’est juste parce que cela me plaît !

Dans cette partie du quilt, les contrastes sont parfois moins marqués, les répétitions n’ont pas été évitées… Ces imperfections donnent pour moi de l’intérêt à l’ensemble, l’oeil s’attardant sur toutes les particularités.

Me lancer dans un scrap quilt est pour moi une vraie fête, mais attention, il ne faut pas vous risquer alors dans mon atelier, sous peine d’apoplexie. Les tissus sont éparpillés partout, j’ai besoin de tout voir, tout toucher, tout mélanger pour décider ce que je veux faire. Je me plonge sans complexe dans les mélanges improbables mais finalement très sages : n’ai-je pas déjà un jour choisi, élu parmi d’autres, chacun de ces morceaux ?

Ce goût pour la liberté d’association des tissus m’a été insufflée par un formidable livre de Roberta Horton*. J’avais déjà la fascination des associations vues dans des quilts anciens, ainsi que ceux de Will Vidinic dont je conservais toutes les photos publiées dans divers magazines. Ils me parlaient tellement plus que les ouvrages bien sagement symétriques ! Ce livre culte m’ouvrit une autoroute vers le Scrap Quilt et, plus tard, me donna les clés pour mieux conseiller mes élèves dans les choix des tissus.

Au XXIe siècle, nous avons celle que les quilteuses américaines appellent « La Diva du Scrap quilt », Bonnie Hunter. Nous sommes des milliers à lire son blog, suivre ses quilts-mystère, copier ses idées… qu’elle partage si généreusement. Plus que de longs discours, si vous ne la connaissez pas encore, allez visiter :

– son blog, http://quiltville.blogspot.com/, vous suivez en continu ses déplacements, son enthousiasme, ses conférences, ses lectures… Foisonnement d’activités non-stop !

– son site http://quiltville.com/ : ici, c’est la caverne d’Ali-Baba ! vous avez un nombre impressionnant de modèles de scrap-quilts innovants, de multiples trucs et astuces de stockage, de coupe, de montage… J’ai aussi beaucoup appris d’elle, cela m’a souvent aidé à améliorer les stages que j’ai pu proposer.

– ses livres : Adventures with Leaders & Enders, des astuces très futées de prédécoupe des tissus, ou aussi comment coudre 2 tops à la fois… Epoustoufflant ! Et aussi : Scraps & Shirttails, re-use, re-purpose, recycle, the art of quilting green, puis le tome 2 Scraps & Shirttails 2, continuing the art of quilting green, avec des quilts utilisant toutes sortes de restes de tissus, des techniques d’assemblage si futées que vous faites des quilts (presque) en un clin d’oeil.

Si vous n’avez encore jamais tenté de vous lancer dans un scrap-quilt, vous ne connaissez pas encore toutes les joies du patchwork, essayez, vous serez sans doute conquise ! C’est aussi la satisfaction de faire diminuer son stock de tissus parfois envahissant…

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* Scrap Quilts, the Art of Making Do (1998), également en français Scrap Quilts, l’art d’utiliser les chutes de tissus (2000). Ce livre se fait rare sur le marché… Rançon du succès !