L’art nous permet de ressentir des émotions, des plus belles aux plus dérangeantes parfois. Je fais le choix aujourd’hui de partager un dessin digital qui me fait rêver…
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Sous des cieux inédits avec Vincent
Ayant besoin de quelque temps pour mettre de l’ordre dans mes beaux souvenirs de Pour l’Amour du Fil, je vous propose de patienter en reprenant notre balade amoureuse avec Vincent van Gogh.
Vincent van Gogh passa une année au pied des Alpilles, son talent exacerbé par la beauté des paysages, malgré ses crises qui survenaient tous les trois mois. Entre-temps, ses visions géniales et inédites se concrétisent sur toile, son talent s’épanouit dans la lumière provençale… Après Arles, je me devais de suivre Vincent van Gogh à St-Rémy-de-Provence, là où il s’est volontairement fait interner. Homme préférant la nature à la ville, il savait qu’il s’y sentirait mieux qu’à l’hospice arlésien.
Lire la suite de « Sous des cieux inédits avec Vincent »La Maison Jaune de Vincent
Il y a 169 ans, jour pour jour, naissait Vincent Van Gogh. Il faisait partie d’une famille bourgeoise originaire de La Haye, vivant à Zundert, tout près de la frontière belge. Ses parents n’eurent pas un brin de psychologie en lui dédiant le prénom de leur premier enfant mort-né un an plus tôt, jour pour jour (le 30 mars 1852) ; à l’époque on ne pensait pas au ressenti de l’enfant. Ainsi, le petit Vincent accompagna sa mère éplorée à chaque anniversaire, se recueillant devant une tombe gravée Vincent Wilhem Van Gogh – son propre nom. Il savait cette réalité enfant, l’a occultée ensuite, pour redécouvrir sa place d’enfant de remplacement à l’âge adulte, ce qui ne put qu’être un gros choc mal vécu. Son oncle paternel, commerçant d’art, se prénommait déjà Vincent Van Gogh, son neveu sera aussi un petit Vincent Wilhem… Cela fait partie des habitudes familiales de naguère, mais expliquent aussi son mal de vivre.
Par petites touches et grands aplats, continuons d’évoquer ensemble Vincent Van Gogh. Amoureuse de ce peintre depuis mes 13 ans, j’avais proposé un exposé au Collège sur Lui malgré ma timidité, j’avais écrit une rédaction sur sa Nuit Étoilée en 4e (la meilleure note en rédac’ de ma vie !), j’écrivais dans un cahier ce qu’il m’inspirait, j’avais été en stop à Amsterdam pour aller voir ses peintures « en vrai », au grand dam de mes parents mis sur le fait accompli, et au cours de mon grand périple aux USA à 19 ans, je suis allée voir La Nuit Étoilée à New-York… il fait partie des artistes qui accompagnent ma vie et plusieurs circonstances me le remettent sur mon chemin ces jours-ci. La chance de tenir un blog, c’est de pouvoir partager !
Ma deuxième fille a des talents de peintre, et lorsqu’elle avait 16 ans, avec les conseils avisés de son super-prof, elle a pensé m’offrir des reproductions de tableaux que j’aime… peintes par elle-même. J’ai donc des « originaux » chez moi, parmi mes biens les plus précieux : 2 Van Gogh, 1 Gauguin (et La Jeune Fille à la Perle de Vermeer aussi !!). Je dois dire que mes photos vues sur écran ne sont pas à la hauteur…
Il y a deux semaines, j’ai fait un petit voyage en Provence, sur les traces de Vincent… Évoquons aujourd’hui la célèbre Maison Jaune d’Arles et quelques-uns de ses tableaux dans la célèbre ville millénaire. On ne sait pas trop ce qui mena Vincent à choisir Arles, à part la ligne de chemin de fer directe de Paris. Déjà, cette ville était peu considérée pour sa propreté. Malgré le charme de son centre, la ville n’est classée que 190e sur 202 selon 9 critères sur l’agrément d’y vivre. C’est pourtant une ville au cœur d’une nature éblouissante…
Vincent en Provence, ce sont environ 850 dessins, études, aquarelles et tableaux à l’huile en 26 mois, il rêvait et vivait les lumières, les couleurs, les ambiances.
À Arles, il me fallait retrouver les lieux de ses tableaux, et tout d’abord sa maison jaune ! Son adresse est connue, 2, place Lamartine, tout près de la porte Nord de l’enceinte de la vieille ville.
Il arriva de Paris en train le 22 février 1888, s’installa dans un hôtel du quartier de la gare et aménagea le 17 septembre dans cette maison toute proche, rénovée pour moitié à ses frais, repeinte avec un crépi beurre frais et des volets verts… Un lieu joyeux pour soigner ses angoisses, une nouvelle vie pleine d’espoirs, de projets d’art et d’amitiés.
Vincent ne vécut que quelques mois dans cette maison jaune exposée plein Sud (l’aile de droite aux volets verts). Il avait meublé les deux étages avec le souci constant de bien accueillir son ami Paul Gauguin, rencontré deux ans plus tôt à Paris. Son rêve était de créer une communauté de peintres, comme naguère à Barbizon ou au même moment à Pont-Aven.
Elle aurait dû être une maison du bonheur, une maison où se réuniraient ce cercle rêvé d’artistes peintres, L’Atelier du Midi. Au rez-de-chaussée, la pièce à vivre salon-cuisine et l’atelier, au 1er deux chambres, la plus belle, avec un lit en acajou, destinée à Paul, l’ami longtemps attendu. Pas de salle de bains ni même de WC (commodités dans la maison voisine, un hôtel), mais tout de même l’eau courante (froide seulement), une gazinière pour faire à manger (Gauguin aime cuisiner). Hélas, on le sait, la communauté ne dura que 2 mois et se termina en tragédie, l’oreille coupée de Vincent, la veille de Noël 1888.
Paul Gauguin (1848-1903) fut un peintre remarquable avec un sens des couleurs raffiné, à l’influence aussi forte que Van Gogh pour la peinture à venir. Sa vision de la lumière dans la peinture avec les impressionnistes, son utilisation du cernage (le cloisonnisme*), des aplats de peinture avec les Nabis, des thèmes mystiques avec le symbolisme, sa recherche de la simplicité et de l’exotisme ont fait date dans l’évolution de l’art. Seulement, l’homme n’était pas toujours à la hauteur de son talent. D’une vive intelligence mais marginal colérique, il s’aigrit prématurément et aime se comparer à Jean Valjean (Les Misérables, Victor Hugo) et même à Jésus, incompris comme lui… Il a tendance à manipuler les gens, ses amis et ses femmes, souvent bien jeunes…
*J’en avais parlé dans l’article Le fil noir
Vincent & Paul ont cependant fait, pendant ces deux mois de vie commune, des séries de tableaux remarquables, baignés d’une chaude lumière automnale, émulés l’un par l’autre. Ils visitèrent notamment les Alyscamps (Champs-Élysées en provençal), vestiges d’une nécropole romaine au centre de la ville. Cependant, leurs différences s’exacerbent ; Vincent peint avec acharnement ses émotions d’après la nature, Paul le mystique maintient que l’art doit être porté par l’imagination.
En apparence Gauguin était le maître.
En réalité, la plupart du temps, c’était Vincent le meilleur.
Martin Gayford
L’histoire retient qu’au cours d’une violente dispute à la veille de Noël 1888, Vincent se mutila le lobe de l’oreille ; d’autres croient que c’est Paul, maître d’escrime, qui le blessa. On n’en saura probablement jamais rien. Paul quitta Arles vers d’autres cieux, ils ne se reverront plus jamais.
De nos jours, la Place Lamartine est devenue un grand rond-point, avec un Monoprix sur le côté et des voitures qui passent, sûrement sans aucune pensée pour le peintre. Il y a 12 jours, j’étais à l’emplacement de la maison jaune. La Place Lamartine est-elle embellie, riche du passage de ces peintres ? Aujourd’hui, c’est ainsi :
La maison jaune a disparu, il reste la maison à 3 étages, que je croyais accolée à la maison jaune, mais où il y avait un passage, ce qui la sauva. Qui a osé s’en prendre à la maison de Van Gogh ?
La guerre d’Ukraine m’a ramenée à Van Gogh via AK Moghaddam, avec les bleus et les jaunes, et voilà que l’histoire de son habitation fétiche rappelle l’actualité cruelle. Les guerres sont absurdes.
Il y a des fleurs partout🌸🌻🌺🌼🌷🥀🏵🌹
pour qui veut bien les voir.
Henri Matisse (1869-1954)
On peut être saturé par les Tournesols de Van Gogh, tellement on en a vu de mauvaises reproductions parfois pâlies par le temps, ou jusqu’à saturation sur les boîtes de chocolat de notre enfance… Mais les séries de fleurs en bouquets sont simplement splendides et nous rappellent, encore une fois par ce curieux rapprochement à multiples entrées, l’Ukraine, dont c’est un emblème national.
Il y eut deux séries de tournesols, ceux-ci datent d’août 1888. Plus tard, à St-Rémy, il peindra des iris…
La vérité est que Van Gogh sublimait tout. Pourquoi tenter de reproduire la réalité avec exactitude quand la photographie existe ? C’est déjà ce qui conduisit ses amis Impressionnistes à s’éloigner de l’art académique. Lui a su ajouter, avec la découverte de la lumière provençale, une vibration qui, des dizaines d’années après, continue de nous émouvoir. Il était un très bon peintre à Paris, il est devenu un génie sous la lumière provençale, peignant l’émotion créée par ce qu’il voyait.
A deux pas de sa maison, le Rhône. Les quais construits en dur renforçaient déjà les berges depuis les inondations terribles de 1856. Son talent a transformé le paysage en féerie nocturne.
Raymond Martinez a scruté les étoiles avec le locigiel Stellarium, afin de préciser le moment de la peinture (voir Futura-Sciences). Cette investigation l’a mené à découvrir une structure jusque là négligée :
C’est un pont qui rappelle la Hollande à Vincent, pas étonnant, il fut construit par un ingénieur hollandais vers 1820-30. Il a été bombardé et remplacé par une structure en béton armé qu’on ne remarque même pas en passant dessus, en pleine ville. Mais un pont similaire à celui peint par Van Gogh a été acheté par la ville, remonté en aval du canal, pour le plus grand plaisir des touristes ! Je ne suis pas allée le voir…
Pendant cette période, Vincent peint beaucoup de portraits, de lui-même et d’autres ; son problème est de trouver des modèles consentant à rester immobiles un certain temps !
Les portraits comme les scènes de la nature sont les inspirations majeures de Vincent.
Ce matin j’ai travaillé à un verger de pruniers en fleurs, tout à coup il a commencé à faire un vent formidable, un effet que je n’avais jamais vu qu’ici, et qui revenait par intervalles. Entre temps du soleil qui faisait étinceler toutes les petites fleurs blanches.
C’était tellement beau !
Vincent à Théo, le 11 avril 1888
Alentour, la ville ne s’étirait pas en triste banlieue comme maintenant. A quelques pas, sous sa fenêtre, c’était le Jardin du Poète, puis de l’autre côté les vergers et les champs.
Comme les Peuples Premiers, comme les paysans qu’il aimait côtoyer, Vincent trouvait du Sacré dans la nature, les végétaux et, surtout, les étoiles… Elles seront encore plus présentes dans les tableaux peints à St-Rémy-de-Provence.
Restons encore un peu à Arles, période à la fois productive, heureuse et éminemment dramatique, avec les premiers troubles psychiques forts de Vincent, même si la dépression couvait depuis bien des années. Aucun peintre n’a motivé autant de livres : des essais, analyses ou histoires romancées… Lui-même écrivait autant qu’il peignait, beaucoup de clés pour le comprendre sont dans ses lettres, mais jamais on n’écrit tout… Plus je lis à son sujet, plus je constate que chacun garde en son cœur « son » Vincent, et il me plaît de l’imaginer, au fond de lui, plus heureux au quotidien qu’on ne le décrit. Il a la chance d’être aimé inconditionnellement par son frère qui lui permet de vivre sa vie choisie d’artiste, qu’il peut créer chaque jour sans autre occupation que de rêver à son prochain tableau et d’écrire au sujet de sa passion, qu’il est foncièrement gentil et que les gens autour de lui le sentent. Bizarre, mais gentil , le Hollandais !
Aujourd’hui, les restaurateurs font leur possible pour satisfaire les touristes, le bâtiment est peint en jaune éclatant ; il était cependant fermé et bien triste, comme une femme mal fardée, sa terrasse servant de stationnement… La Place du Forum est d’ordinaire animée, mais pas en mars par temps gris.
Dans la Maison Jaune, Vincent écrivit un jour à son frère Theo :
Mais le peintre de l’avenir c’est un coloriste comme il n’y en a pas encore eu. Manet l’a préparé, mais tu sais bien que les impressionnistes ont déjà fait de la couleur plus forte que celle de Manet. Ce peintre de l’avenir, je ne puis me le figurer vivant dans de petits restaurants, travaillant avec plusieurs fausses dents, et allant dans des bordels de zouaves comme moi. Mais il me semble être dans le juste…
Que d’émotions en lisant ce fragment de lettre…
Si on avait pu lui faire savoir qu’il était ce fameux peintre de l’avenir, le coloriste comme il n’y en a jamais eu !
De février à mai 1889, il vécut en maison de santé, expulsé de la Maison Jaune par les voisins irrités… Vincent a ensuite choisi de se faire interner à une vingtaine de km dans les Alpilles, au monastère St-Paul-de-Mausole à St-Rémy-de-Provence. Il y restera un an et il y peindra ses plus beaux tableaux.
Je reviendrai peut-être avec Vincent,
à St-Rémy-de-Provence puis Auvers-sur-Oise,
avec d’autres nuits étoilées et d’autres journées ensoleillées,
Katell
Exprimer l’espoir par une étoile
L’espoir se conjugue en bleu et jaune, malgré la noirceur du monde.
Dès que le temps est dégagé la nuit et qu’on s’éloigne des lumières artificielles, on a un des plus beaux spectacles du Monde : le ciel étoilé, bleu et jaune.
Invitation au voyage en bleu et jaune avec AK Moghaddam et son Fancy Van Gogh (Van Gogh de fantaisie), un Vincent qu’il imagine bien plus gai que l’image qu’on nous a transmise dans l’Histoire de l’Art. J’y reviendrai un jour ! Amoureuse de Van Gogh depuis mon adolescence, je lis en ce moment plusieurs romans et essais sur ce peintre. J’ai des surprises. Et puis cet illustrateur iranien est arrivé dans mon petit monde. Et puis le bleu et le jaune nous relient au soutien des Ukrainiens. Je déroule des bobines, ajustant les fils pour tisser les étoffes de mes rêves.
Je rêve ma peinture, ensuite je peins mes rêves.
Vincent Van Gogh
Les lettres de Vincent, soigneusement sauvegardées par Théo puis sa femme Johanna, sont emplies de poésie, d’intelligence, de culture… Le pauvre hère complètement fou hors de la société n’est pas l’image à retenir de Van Gogh. Il était artiste avant tout, et profond, touchant, sensible, intelligent, cultivé…
Je peux très bien m’en tirer dans la vie et dans la peinture sans le Bon Dieu, mais par contre, je ne peux pas m’en tirer, moi, être souffrant, sans quelque chose qui soit plus grand que moi, qui est toute ma vie – la force créatrice… Je voudrais peindre des hommes et des femmes dotés de cet aspect d’éternel dont le symbole était autrefois l’auréole et que nous essayons d’exprimer par le rayonnement et les vibrations frémissantes de nos couleurs… Exprimer l’amour d’un couple par l’alliance de deux couleurs complémentaires, par leur mélange et leur contraste, par la vibration mystérieuse des tons se rapprochant. Exprimer le spirituel sur un front grâce au rayonnement d’un ton clair sur un fond obscur. Exprimer l’espoir par une étoile. La passion d’un être par un coucher de soleil éclatant.
Si je m’arrêtais d’agir, d’étudier, de chercher, alors, malheur à moi, je serais perdu.
J’éprouve une passion irrésistible pour les livres et un besoin constant de cultiver mon esprit, d’étudier, qui m’est aussi vital que le pain.
Vincent
Il était drôle aussi !
Je suis en train de peindre avec l’entrain d’un Marseillais mangeant de la bouillabaisse, ce qui ne t’étonnera pas, quand il s’agit de peindre des tournesols.
Vincent
Que cette parenthèse fantaisiste vous fasse autant de bien qu’à moi ! Je serai heureuse de vous montrer, dans mon prochain post, des photos de mon Etoile (Lone Star) enfin terminée !
Exprimer l’espoir par une Étoile…
Prenons bien soin de soi et des autres,
Katell
Soutenir les Ukrainiens – Suite
Non, ce n’était pas un cauchemar, c’est la triste réalité. Chaque jour a ses informations glaçantes, ses images-choc venant d’Ukraine. Après la pandémie, la guerre en Europe. Certains réussissent à nous faire presque sourire de la situation malgré tout :
Nous vivons en outre dans un monde qui entretient la peur, avec nos réseaux sociaux et nos chaînes d’information continue. Mais c’est une chance aussi, celle d’avoir des informations sur place, sans intermédiaire : plusieurs quilteuses ukrainiennes communiquent, nous les soutenons autant que possible sur Instagram et surtout Facebook. On ne peut pas nous cacher le désarroi des gens qui vivaient il y a 15 jours encore une vie normale.
Que faire ?
Dès les tout premiers jours, nous avons su que l’urgence est dans l’aide médicale et matérielle. Les organismes habituels s’organisent pour porter un soutien maximum aux frontières, où se retrouvent des centaines de milliers d’Ukrainiens – femmes et enfants pour la plupart. Catherine Bonte, présidente de France Patchwork, a listé les plus connus qui sauront utiliser nos dons de la meilleure manière possible : Croix Rouge Internationale, UNICEF, Médecin du Monde, Secours Populaire, Fondation de France opération Ukraine …
Faire un don, c’est généreux et formidable. Une fois le virement fait, on ressent une certaine satisfaction, mais elle n’est pas toujours durable et ne comble pas notre angoisse. Nous avons survécu plus ou moins bien à l’incertitude du Covid19, la crainte pour ses proches et pour soi-même, et voilà que nous nous sentons menacés par cette guerre qui se passe en Europe. Notre territoire n’est peut-être pas menacé, nos militaires peut-être pas non plus, mais les informations nous rendent les Ukrainiens extrêmement proches et ne quittent plus nos pensées, la bravoure de leur Président et des habitants force l’admiration. Et voilà que la menace nucléaire empêche plus d’un de dormir sur ses deux oreilles. L’opacité du caractère putinien nous laisse dans l’incertitude et l’angoisse.
Une idée de don que je trouve originale et futée est donnée par Weeks Ringle (Modern Quilt Studio) : aller sur le site Airbnb pour louer une chambre le plus tôt possible et le locataire recevra votre argent le jour de votre séjour supposé. Vous êtes ainsi « an Angel Guest », un invité-fantôme dirait-on moins joliment en français, ou un client invisible. Il faut bien sûr signaler que c’est une fausse location. Un moyen direct, sans intermédiaire, de faire rentrer de l’argent pour la population. Tant que les réseaux internet fonctionnent encore en Ukraine, c’est très malin. Dans la même veine, on peut acheter des patrons ou des ouvrages aux artistes ukrainiennes par ETSY. Par ces biais, des liens amicaux peuvent aussi se créer…
Alors, que faire d’autre ?
Pour vaincre notre peur, se couper complètement des informations, pour faire comme si la vie post-Covid, pleine de joies et de loisirs retrouvés, était notre monde, est illusoire. La crispation ambiante aura bien fait de nous rattraper. Se raisonner pour ne pas passer la journée devant les infos – pour les personnes qui en ont le temps – est déjà une petite victoire contre l’angoisse.
La meilleure stratégie pour atténuer son angoisse, c’est sans doute l’action. On peut aller marcher bien sûr, c’est bien pour soi. N’oublions jamais ce remède miracle. Mais je pense bien sûr à des actions liées à la solidarité. Des milliers de personnes en France se remuent. Comme nous savons ce qui est urgent, des convois partent déjà, pleins de médicaments, de matériels de soins et d’hygiène. Je suis l’association catalane Alliance Occitanie-Ukraine qui existe depuis 14 ans, ils sont vaillants, organisés et pourtant submergés par le nombre de dons et de bonnes volontés (et trop de messages auxquels ils ne peuvent répondre!).
Toulouse étant jumelée avec Kiev depuis 1975, de nombreux liens culturels et amicaux existent depuis longtemps. L’accueil ici se fera sans doute à grande échelle, tant par les particuliers que par la mairie et la région Occitanie. Nous avons une adresse (accueil-ukraine@mairie-toulouse.fr) pour notifier notre possibilité d’accueillir des personnes, temporairement ou à plus long terme. Ces listes s’établissent peu à peu un peu partout en France, contactez votre mairie si vous êtes volontaires : il y aura une centralisation nationale des offres pour diriger les réfugiés aux endroits disponibles.
Ce drapeau a été fait l’année dernière, pendant les célébrations joyeuses des 30 ans du pays libre. Sasha, quilteuse moderne ukrainienne, vend à présent ce petit modèle parce qu’on lui demande, du monde entier, comment aider. Elle est dans l’Ouest du pays, pour le moment épargné, mais qui abrite déjà plus de 40 000 réfugiés. Tout l’argent récolté sera pour leur venir en aide. C’est par ici, 5,66€ le patron ce jour (prix fluctuant en €).
Nous sommes des quilteuses et la solidarité passe irrémédiablement par nos ouvrages. Nous sommes faites ainsi ! Nous savons que nous n’allons pas pouvoir offrir des quilts dans les jours qui suivent… cela tombe bien car ils ne sont pas faits 🙃. Projeter de faire des blocs ou des quilts calme notre angoisse. Être dans l’action fait du bien…
Après le succès de l’offre de l’Australienne Kristy Lea @quietplay (voir mon article précédent), d’autres s’en inspirent. Cela fonctionne très bien aux États-Unis ! Pat Sloan par exemple, a échangé le modèle ci-dessous (que tout le monde pourrait faire d’après la photo) contre un don à l’UNICEF pour l’Ukraine. La dernière mise à jour est de 65 000 $ !
D’autres vendent des tee-shirts avec impression tournesol et mille autres objets… Mobilisation générale pour récolter de l’argent aux États-Unis..
Quant à Bonnie Hunter, elle va commencer un « Quilt Along » fin mars, pour guider et motiver celles qui souhaitent faire un grand quilt plein de cœurs bleus et jaunes ! Ces quilts pourront ainsi servir à lever des fonds avec des tombolas… ou offrir à des Ukrainiens.
Et en France ? Eh bien, il s’est constitué un groupe très sympathique et dynamique sur Facebook, Des Tournesols pour l’Ukraine ! Discussions, recueil de blocs de tournesols, de colombes pour la paix, de déclinaisons de drapeaux… C’est très convivial et peu à peu, nous allons faire des blocs, des quilts… et les fondatrices du groupe sont bien informées des difficultés pour faire parvenir ces dons. Tout sera envisagé en temps voulu : des tombolas pour reverser l’argent, des dons aux réfugiés en France, un convoi quand la paix sera revenue… Ne s’y inscrivent que les personnes qui en ont envie et c’est ainsi une bulle bleue et jaune, où on entretient l’espoir d’un pays libéré le plus vite possible.
L’ampleur de cet élan de solidarité est inédit dans le monde occidental, car ce conflit rappelle la guerre froide que nous espérions définitivement enterrée. Il y a dix jours encore, le « monde d’après » était consacré à la fin de la pandémie ; nous avons si vite changé de monde, encore une fois, que l’expression prend un autre sens qui nous éloigne bien loin de nos rêves.
Tous les matins, on a une mission. Trouver la gaieté au milieu des raisons de désespérer. La beauté au milieu des laideurs. La gentillesse au milieu des visages fermés. Les caresses au milieu des griffes. La tendresse au milieu des gifles. L’ouverture au milieu des fermetures. Si vous acceptez cette mission, la journée sera magnifique.
Si vous la refusez, allez vous recoucher tout de suite !
Edouard Baer
Ne plus prendre au sérieux ses peurs,
mais prendre au sérieux ses rêves pour tenter de les rendre réels…
Gardons espoir et agissons, chacun à notre mesure…
et un peu plus, pour un « monde d’après » vivable.
Katell